Après l'hiver qui nous a paru si long et ce printemps qui n'en finit plus de s'étirer paresseusement, on avait tellement hâte que toute la glace soit partie jusqu'au fond de la baie pour qu'on puisse enfin se rendre en bateau jusqu'au p'tit château. Je sais, ça fait prétentieux d'appeler ce campe « le p'tit château » mais il ne faut pas prendre cette appellation au premier degré. Il y a toute une histoire derrière cette expression trompeuse, je vous la raconterai peut-être un jour mais pour tout de suite, je vous y emmène passer la fin de semaine avec nous!
Vendredi en début d'après-midi, il nous est apparu au détour du dernier méandre.
La glace avait libéré le bras de la rivière mais ça ne faisait pas longtemps, on en voit encore les derniers vestiges.
Une fois le bateau bien attaché au quai, on a toute la fin de semaine devant nous et malgré qu'on nous annonce toutes sortes de températures pas très agréables en cette saison, on ne voudrait pas être ailleurs qu'ici et maintenant. On va prendre des nouvelles de la forêt, de la faune et de la flore et puis, il y a tant à faire ici que la fin de semaine va être encore trop vite passée.
Mais commençons par goûter le calme et la paix qui nous envahissent en ce vendredi 13 qui signifie la chance plus que jamais.
Il y a mon Ti-Coq qui vient m'accueillir peu après mon arrivée, l'air de dire : « Bon ben te v'là, toi, c'est pas trop tôt! »
Même Crocodile Dundee n'en revient pas du comportement de ce tétras mâle. On sait bien qu'il est en pleine saison des amours mais il n'agit pas du tout de la même manière avec lui qu'avec moi.
Il traite Crocodile Dundee comme un rival, il défend son territoire, il l'affronte, se montre arrogant et gonflé d'orgueil alors qu'avec moi, au contraire, il virevolte tout excité, il déploie tout son arsenal de charme.
C'est ainsi qu'il vient se poser sur une branche près de moi pendant de longues minutes où il se laissera admirer et photographier tant que je veux. Et aussitôt que Crocodile Dundee s'approche, il s'envole plus loin, complètement furieux!!! Bon joueur et n'ayant pas peur de la compétition, Crocodile Dundee décide de nous laisser seuls, en tête à tête, pour aller voir comment « ses » petits castors avaient survécu ces deux dernières semaines.
Crocodile Dundee était tellement content de les revoir, ses deux petits castors, qui ont survécu à l'hiver! C'est que l'automne dernier, il avait craint pour leur survie en voyant la trop petite quantité d'amas qu'ils avaient sauvegardée pour la froide saison. Tout au long de ce dur hiver, il leur plaçait des petites branches de trembles près de l'entrée de leur cabane et il l'a fait régulièrement. Chaque fois qu'il y retournait, la réserve était presque épuisée, ce qui était un bon signe. Il y avait de la vie là-dedans. Crédit photo : Gilles Rivest.
C'est comme quand on se rend compte que les petits sont rendus autonomes et qu'ils vont se débrouiller sans nous! Quelle fierté! Crocodile Dundee a fait deux vidéos où l'on voit les deux petits castors pleins de vie et en bonne santé mais il a aussi pris des photos. Vous savez comment on est avec nos enfants, hein? On passe notre temps à les poser! Crédit photo : Gilles Rivest.
On nous l'avait pourtant annoncé d'avance mais on s'en fichait un peu, on le croyait pas. C'était pourtant vrai : dimanche matin, on s'est réveillé avec un tapis de neige au sol... Crédit photo : Gilles Rivest
La vie de château
Samedi a été pluvieux et gris. Qu'à cela ne tienne, ça nous arrangeait un peu. Crocodile Dundee avait tant à faire dehors malgré la pluie et moi, j'avais tout ce qu'il fallait pour me lancer à corps perdu dans le grand ménage du p'tit château : le baril d'eau de pluie plein à ras bord tout le temps, la chaleur douce et réconfortante du poêle à bois et des petites bûches en masse pour la faire bouillir, la radio de Ici Radio-Canada Première pour me sentir à la fois si proche et si loin du monde. J'étais la reine du p'tit château et Crocodile Dundee, le roi.
C'est fou, les idées incongrues qui me sont venues à l'esprit quand je m'affairais à la tâche en écoutant les actualités de la fin de semaine à la radio. Pendant que tout le Québec avait l'air de considérer la liberté d'expression des humoristes comme la chose la plus importante au monde, on se mobilisait, on s'insurgeait, on se scandalisait, on faisait des gorges chaudes à propos de ce qui me semblait être des détails de régie interne qu'on transportait sur la place publique, moi, j'étais là à me demander comment il se faisait qu'on laissait depuis des années nos politiciens bousiller complètement notre système public de santé et de l'éducation sans réagir. Décidément, je ne comprends plus la société dans laquelle je vis. Quand je suis au p'tit château, c'est ce qui me frappe de plein fouet : comment en suis-je venue à ne plus me reconnaître dans les préoccupations de la population de ce Québec que j'aime tant?
Faudra-t-il mettre en scène une téléréalité qui nous montre chaque semaine les cas les plus flamboyants, les plus révoltants, les plus pathétiques, pour que le monde se décide à s'intéresser, à réagir, à se mobiliser et à intervenir, face à des enjeux sociaux et politiques qui nous concernent tous?
10 commentaires:
La vie de château, c'est autant dans la tête que ça se passe que dans la réalité.
Bon séjour dans votre royaume!
@ P.-É. Larivière : Merci beaucoup, on y retourne vendredi matin mais cette fois, on nous prévoit 24 degrés avec du soleil. Et le grand ménage est fait!
Ce sera l'ouverture de la saison de pêche, y aura-t-il du doré au menu dans le royaume? Heureux printemps à vous aussi!
Bonjour Zoreilles,
Ça fait du bien de ne pas se sentir seul. Tout comme toi, je me suis vraiment demandé dans quelle sorte de monde nous étions rendus.
J'avais vraiment de la difficulté à comprendre toute cette belle unanimité, cette levée de bouclier autour d'un thème où on parlait de liberté d'expression comme si, en son nom, tout était permis.
J'en ai été scandalisé. Il y a beaucoup de bons humoristes au Québec. J'aime bien Jean-Marc Parent et bien d'autres. Mais il y en a trop qui, pour être drôles, ne semblent pas trouver d'autres moyens que de tenir des propos vulgaires et blessants. C'est normalement très proche de ce qu'on appelle dans les cours d'école de l'intimidation. Est-ce que des propos vulgaires et blessants ont plus leur place sur les scènes que dans les cours d'école? Est-ce que c'est drôle?
Ce qui me surprend, c'est de voir que certains humoristes au talent douteux soient si populaires et fassent tant rire. Ce sont eux que l'ont voit partout. Il semble exister un réseau bien organisé.
@ Jacks : Effectivement, ce réseau est bien organisé, il y a des as du marketing aux commandes pour vendre au monde en un temps record l'urgence, la nécessité et le goût de monter aux barricades pour les « droits » qu'ils jugent importants de défendre. On semble oublier qu'avec les droits viennent aussi les obligations. Et quand on a la chance d'avoir une tribune, que ce soit en humour ou dans tout autre domaine, on devrait au moins être conscient de l'influence qu'on peut avoir et ne pas en abuser pour ostraciser une personne, un groupe de personnes, etc.
Les gens sont libres d'acheter les billets de spectacle qu'ils veulent et je ne comprends pas moi non plus l'engouement que suscitent certains humoristes. Et c'est ce qui me désoriente le plus, leurs salles sont pleines, ils cartonnent, ils gagnent des prix, on érige leur petitesse en système, on les applaudit...
Je me sens aussi marginale quand je vois tous les appuis de Donald Trump chez nos voisins du Sud. Je comprends pas... Y a donc tant de gens que ça qui le soutiennent dans la population?
C'est pourquoi j'écrivais ironiquement qu'on devrait copier leurs méthodes de « vente » pour mobiliser la population sur des sujets et des enjeux qui devraient nous préoccuper bien davantage.
Que je te comprends. Une vraie vie de château.
@ Le factotum : Ton royaume n'est pas si loin du mien, n'est-ce pas, le roi Facto? Bien le bonjour à la reine Ipso et heureuse saison de vélo!
Vous avez bien de la chance d'avoir un endroit comme ça, une vie de château bien plus attirante que celle dans les monster house qui poussent dans notre région. Je vous souhaite beaucoup de bonheur dans votre domaine.
@ Solange : Merci Solange, tu me fais réaliser encore davantage la chance qu'on a de vivre dans une région qui permet encore ce genre de vie de château. Loin de la « civilisation », pas d'électricité, pas de téléphone, pas d'énergie autre que le solaire (avec une exception pour la cuisson avec une cuisinière au propane) on a la chance de retourner dans le temps, dans la plus grande simplicité, je dirais même le dépouillement, la débrouillardise, se débrouiller avec l'eau de pluie pour l'hygiène, l'eau de source puisée pas loin pour la consommation, etc.
On y retourne demain d'ailleurs. Félixe a une journée pédagogique, elle nous accompagnera (elle a l'âge de ta Béatrice, tu te souviens?...) elle a tellement hâte, elle connaît cette vie depuis sa naissance, ça fait partie d'elle et ce sera pareil pour sa petite sœur. Le reste de la petite famille viendra nous rejoindre dimanche.
Il y a toujours du bonheur là-bas et on vient y puiser tout le ressourcement dont on a besoin.
Mes petits-enfants aussi sont en pédagogique demain mais je n'ai pas de château, Béatrice aurait un plaisir fou avec Félixe.
@ Solange : Elles s'entendraient aussi bien que toi et moi, Solange!
Et finalement, nous autres, c'est plutôt samedi que le reste de la petite famille viendra nous rejoindre, ils ont trop hâte, la dernière fois qu'ils sont tous venus, c'était dans la semaine de relâche. Mais Félixe est super contente de partir demain matin et de passer 24 heures seulement avec Papi et Mamie!!!
Je vais revenir en ville avec les enfants dimanche, Crocodile Dundee restera là-bas jusqu'à lundi, il veut repeindre le plancher du p'tit château après qu'on sera partis.
Bonne fin de semaine à toi aussi, quel que soit le château dans lequel tu passeras ces belles journées ensoleillées qu'on nous promet.
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