Photo : L'auteur de la photo et co-auteur des jours de Félixe, en plus d'être un artiste de l'image, s'adonne aussi à être formidablement inspiré par le sujet que voilà. Une si jolie frimousse, imaginez lorsqu'elle aura des cheveux et des dents!
Chut... Elle fait dodo juste à côté...
Sa maman doit être sur scène en ce moment. Oh pas seule, non, elle participe, comme d'autres auteurs compositeurs interprètes, à toute une soirée spectacle dans le cadre des Journées de la culture. Son papa est venu la reconduire ici avant souper, la Félixou, pendant que sa maman devait se rendre plus tôt pour les tests de son et la générale. Je les trouvais touchants, ces deux-là, ils avaient tellement l'air de se comprendre, de s'amuser et de faire une équipe du tonnerre, que l'idée m'est venue qu'on avait hérité d'un précieux bagage dans notre lignée féminine. La complicité père-fille, décidément, je n'aurai connu que ça dans ma famille : ma mère et son père, mon père et moi, ma fille et son père, Félixe et son papa. On en a toute une chance et ça, il faut savoir le reconnaître.
Et moi, je vous écris
D'habitude, quand je rédige un nouveau billet, c'est que j'ai lu tous mes amis, mis mon grain de sel partout et que c'est à mon tour de raconter quelque chose. Pas cette fois. J'ai travaillé très fort dernièrement et j'ai manqué de temps cruellement. Alors, je n'ai même pas fait le tour de mes blogues-amis avant d'arriver jusqu'à vous, et je m'en excuse, c'est comme si je parlais haut et fort sans avoir pris la peine de vous écouter avant. Pas très gentil, ça. Mais je vais corriger la situation prochainement, promis.
La semaine dernière, je voulais rendre hommage à En direct des îles. Ça m'a fait chaud au coeur que plusieurs viennent se joindre à moi pour se souvenir d'elle, de la personne qu'elle était, comme on la connaissait par ses écrits.
Puis, Nelly Arcan nous a quittés. J'étais incapable de la lire parce que son mal-être m'atteignait beaucoup trop mais j'ai aimé les entrevues que j'ai entendues et vues d'elle parce que je savais qu'elle avait du talent, en plus de la beauté, de l'intelligence qu'on lui reconnaissait. Son suicide ne m'a pas étonnée mais il m'a fait du chagrin.
Ce matin, ce fut au tour de Pierre Falardeau. Je ne peux pas vous dire comment je me sens... L'autre jour, ma mère a vu sur ma table de salon « Rien n'est plus précieux que la liberté et l'indépendance », le dernier de Falardeau, édité chez vlb, que j'avais dévoré d'une couverture à l'autre. Bien sûr que je lui ai prêté, à ma mère! Hier soir, justement, elle et moi, on en a discuté pendant près d'une heure, de ce bouquin-là et de Falardeau lui-même. On s'entendait au moins sur une chose, ma mère et moi : Pour sa grande sensibilité, la force de ses convictions, sa révolte pleine de tendresse pour son peuple et son pays, le Québec, on admirait Falardeau.
Ce matin, au P'tit marché public du Vieux Noranda, c'est avec ma fille que j'ai eu l'occasion d'en reparler mais là, on avait appris que Pierre Falardeau était décédé tard hier soir. Elle m'a dit : « Moi, j'ai pleuré M'man quand j'ai su ça tantôt ». Je lui ai dit : « Ça t'a touchée personnellement, tu l'aimais tant que ça? » elle m'a expliqué : « Oui. Tu sais, moi, les cinéastes, je les aime et puis c'est pas juste ça... Dans ma génération, j'en connais pas qui vont porter le flambeau sans jamais flancher, des gars libres comme lui, qui vont nous parler de l'indépendance, de se tenir debout, qui vont croire toute une vie en quelque chose et qui vont l'assumer... »
Rien n'est plus précieux que la liberté et l'indépendance. C'était tellement bien choisi comme titre pour son dernier livre. Je l'ignorais quand je l'ai dévoré, son dernier bouquin, mais je lisais le testament politique et social d'un des derniers hommes libres qu'il y avait encore au Québec. Même ma mère fédéraliste admettait ça hier soir, avant de savoir!
Alors, pendant que Félixe fait dodo, je voulais vous dire ça. J'espère qu'elle fera une bonne nuit parce que mamie Zoreilles, elle a besoin de sommeil. Demain matin, on va jouer encore et chanter plein de chansons. Je n'ai jamais eu d'aussi bon public qu'elle, aussitôt que je sors ma guitare, elle respire vite et fait des p'tits cris. Après chaque chanson, elle m'applaudit en tapant sur le plancher. Alors, je lui fais des rappels tant qu'elle en veut. Elle balance son corps avec énergie, je vous le dis, elle danse assise! Bientôt, elle va me faire des ovations debout!
Quand il y a des grands malheurs comme des êtres qui nous quittent et qu'on admire, moi, je m'attarde aux bonheurs qui sont toujours présents dans ma vie. Comme des repères.
--------------------------------------------------------------------------------
Mise à jour du lundi matin
J'ai pris le temps de mieux lire un peu partout ce qu'on écrivait sur Falardeau. Je partage avec vous quelques-unes de ces trouvailles dont ces deux citations de lui :
« Je me fais souvent accuser de dépasser les bornes mais, quand je regarde ça, je me dis, pourquoi ils ont mis une borne là, esti? »
Et au sujet du fameux « nous » sur lequel on s'est tellement chicané au Québec, il pensait comme moi : « Nous qui? Nous quoi? Nous, tabarnak! Ceux qui veulent! »
Et ce que j'ai trouvé de plus touchant, de plus « Falardeau », c'est cette vidéo sur Youtube, où Luc Picard, son ami, a lu à Québec, le 13 septembre dernier, lors de l'événement Moulin à paroles, cette « Lettre à Jérémie, d'un père à son fils, écrite par Falardeau lors du référendum de 1995 ». Vous trouverez cette vidéo sous ce lien :
Non, on n'oubliera jamais Falardeau... L'irremplaçable et l'innénarrable Pierre Falardeau.