Cette photo, je l'ai prise devant chez nous, probablement au temps des fêtes de l'année 2005 selon mes indices mais ça pourrait être n'importe quelle année, puisqu'on a toujours un hiver, notre lac et la patinoire qu'on y fait traditionnellement depuis qu'on est là, donc, depuis 15 ans!
Déjà, plus jeune, j'aimais jouer au hockey bottine moi aussi dans la ruelle à côté de chez nous, dans le quartier où j'ai grandi, à deux coins de rue du Centre récréatif de Noranda, maintenant l'aréna Dave Keon. Rouyn-Noranda a toujours été considérée comme une ville de hockey et plusieurs joueurs d'ici ont fait leur marque dans la Ligue nationale. En tant que fille, par exemple, il était rare que je pouvais jouer à l'offensive, je devais souvent me contenter de la position de « goaler ». Maintenant, c'est différent, les filles ont leur place!
Lorsque nous sommes arrivés ici, dès le premier hiver, avec nos voisins-amis qui avaient emmenagé quelques semaines avant nous, nous avons entrepris de faire, pour nos enfants disait-on, LA PATINOIRE! Des heures de plaisir... Non mais vraiment. Souvent, les petits se fatiguaient et préféraient jouer dans la neige mais nous, on continuait à pelleter, réparer les fissures, enlever la slush dans les coins, péter de la broue, se lancer des défis, chercher la maudite rondelle, déplacer les filets pour repasser un autre petit coup de Zamboni avant de se faire un petit 2 dans 3, qui évoluait vers un 3 de 5, puis un 4 de 7 et qu'on ne compte plus les points jusqu'à ce que nos petits nous rappellent à l'ordre qu'il était assez tard et qu'il fallait rentrer.
Je me souviens être la seule personne à s'y blesser pendant toutes ces années. À l'hiver 93, une fracture de la cheville droite, en patins, avait mis un terme illico à une partie pourtant enlevante et m'avait obligée le reste de l'hiver à regarder plusieurs parties des fenêtres de ma cuisine mais cet accident de hockey avait fait de moi la meilleure faiseuse de chocolat chaud du lac Dufault.
Invariablement, les jeunes de 5 à 16 ans de notre coin s'y donnaient rendez-vous mais ils arrivaient tout le temps... quand la glace était dégagée! C'est curieux qu'avant, ils avaient toujours trop de devoirs. Et quand on voulait, en fin de match, passer les grattes pour que la patinoire reste belle jusqu'au lendemain soir, oups, ils se souvenaient que leur mère leur avait dit de rentrer à cette heure très précise. Parfois même, les jeunes du boutte venaient frapper à notre porte pour nous demander si on allait jouer dehors! Et si on répondait qu'on avait une obligation quelconque, ils nous disaient : « Ben, pouvez-vous allumer les spots de la patinoire d'abord? », ce qui fait qu'on a très bien connu les jeunes du coin parce qu'on a joué au hockey avec eux pendant bien des années et qu'ils nous appellent par notre petit nom, tellement que lorsqu'ils reviennent en promenade chez leurs parents, en toute saison, ils passent toujours nous saluer et on rit beaucoup de nos exploits passés.
Au temps des fêtes, c'est une tradition qui se renouvelle, on se fait toujours un match « comme avant » où l'on joue genre à 10 contre 9, tous âges et tous sexes confondus, c'est toujours nos voisins-amis et nous qui préparons la patinoire et l'entretenons religieusement jusqu'au jour J. Dans la vieille glacière rouge, maintenant, il y a beaucoup plus de « p'tites frettes » qu'il y a de Gatorade mais on cherche toujours « la maudite rondelle molle » dans la neige et on finit par ne plus compter les points. S'il fait un temps doux, ça se termine sur les lieux de la partie, entre grattes, pelles et bâtons de hockey mais s'il fait trop froid, la p'tite frette qui célèbre ou qui console, c'est dans le sous-sol de notre garage qu'elle se prend, l'endroit ayant été baptisé de « bunker » depuis belle lurette.
Notre hockey traditionnel du lac offre plus de privilèges que d'obligations : on a le droit de jouer en bottes ou en patins, d'être dans la même équipe que les membres de notre famille, de quitter la patinoire et y revenir quand on veut si de la visite arrive chez nous et qu'on va les accueillir, on peut aussi y amener son chien s'il est bien dressé pour trouver les maudites rondelles molles perdues et on peut « goaler » avec un hockey ordinaire si c'est tout ce qu'on a. D'un autre côté, on n'a pas le droit de pousser, ni même de poussailler, de jouer « contact », de se chicaner pour les points, de chatouiller l'adversaire ou de compter des buts contre un petit qui joue pour la première fois! Et les motoneiges doivent être stationnées à au moins 30 pieds de la patinoire.
Ah oui, surtout, le règlement numéro 1 : c'est pas toujours aux mêmes à payer les p'tites frettes ou les Gatorade, O.K.?