Photo : Décembre 1987. Je ne sais pas à quoi on pensait... On croyait bien faire! Isabelle avait à peine un an, on l'avait amenée voir le Père Noël. Quand je regarde cette photo aujourd'hui, j'ai envie de rire et pleurer en même temps. Pauvre petite, elle a la détresse imprimée en grosses lettres dans sa jolie frimousse... Je ne crois plus au Père Noël Il était temps, vous me direz... Il ne faut pas s'y méprendre, je crois toujours à la magie de Noël et du temps des fêtes, des rencontres et retrouvailles familiales et amicales, du temps qu'on prend pour vivre de beaux moments, dans la chaleur humaine qui contraste avec la froidure de l'hiver et tout ce qui rend ce temps de l'année si particulier, empreint de tout ce qu'on aime et riche du sens qu'on veut bien lui donner.
Je me tiens loin ces temps-ci de la surconsommation et de la folie humaine qui viendraient rompre le charme si fragile de décembre ou piétiner ce qui me reste encore de mon coeur d'enfant.
J'ai développé avec les années cette drôle de faculté de devenir un peu « téflon » quand on inonde mon environnement de décors et de publicité dès les lendemains de l'Halloween. Ma boîte aux lettres déborde d'offres exceptionnelles, de sollicitations de toutes sortes, de promotions alléchantes, et maintenant, on « s'attaque » aussi à moi par courriel et par téléphone. C'est de bonne guerre et je résiste assez facilement.
Hier, pourtant, dans mon courrier, l'enveloppe qui m'était adressée personnellement par Citifinancière, « Les solutions d'aujourd'hui pour les rêves de demain », m'a choquée. Elle contenait un genre de chèque, « certificat de présélection » de 15 000 $. Il me suffisait de passer un coup de fil au numéro de téléphone inscrit, présenter ce certificat à la succursale locale et j'allais toucher ce montant le jour même. On m'offrait de consolider mes factures, faire des rénovations, payer des dépenses imprévues, rembourser des frais médicaux ou de scolarité et même de me payer un merveilleux voyage avec ceux que j'aime... On faisait appel à mon sens des responsabilités, mon besoin de sécurité et mon goût du plaisir de vivre, de partager avec ceux que j'aime. Je pense que c'est ce qui m'a le plus fait péter ma coche. On n'a pas le droit de me manipuler ainsi, d'utiliser mes vulnérabilités contre moi...
Nenon nenon nenon. Pas question de flancher mais ça m'a un petit peu chatouillé le coeur quand même. J'ai lu tout le document pour essayer de mieux comprendre comment on fait, dans ces entreprises, pour raccoler les clients en 2009. Je me disais qu'on me facilitait tellement les choses que nos gouvernements et institutions devraient prendre exemple sur ça pour me fournir un service à la clientèle digne de ce nom! On me courtise, c'en est gênant... À la fin, au verso, écrit en tout petit tout petit, à la section des modalités, en gris plus pâle, il est question tout bonnement, noyé dans une montagne de chiffres, d'un taux d'intérêt de 29,5 %.
Le pire, c'est qu'il y en aura en masse pour dire oui. J'imagine, sinon, ces promotions n'existeraient pas. Moi, c'est fini, je ne crois plus au Père Noël.
Mes petits trucs à moi pour être dans une ambiance sereine et ne pas péter trop de coches à l'approche des fêtes, les voici :
Les cadeaux qu'on achète sont très limités. Non pas qu'on fasse preuve d'un manque de générosité envers nos proches mais bien que tout au long de l'année, quand l'occasion se présente, on aime offrir ce qui fait plaisir ou qui convient le mieux au moment opportun. Autrement, je garnis des bas de Noël patiemment, au fil des jours, pour les offrir à Noël, on participe aux cadeaux de groupe, etc.
J'aime visiter plus souvent en décembre les personnes âgées de mon entourage. Elles sont tellement laissées à elles-mêmes en cette saison où tout le monde court... Elles savent me ramener à ce qu'il y a de plus beau et de plus vrai. Ce sont elles qui me font des cadeaux hors de prix.
J'écris mes cartes de Noël à la main et souvent à la plume, c'est mon caprice, ma fantaisie. J'ai un bel assortiment varié de cartes, certaines faites à la main, d'autres dénichées en janvier quand on les donne, par des artistes de talent, des timbres en paquets de dix, des autocollants brillants et colorés, des étampes, de l'encre de couleur, etc. J'étale tout ça après souper sur la table de la cuisine, je redeviens la petite fille qui a tout, avec cette impression d'abondance et de plénitude. J'écris des cartes qui sont des lettres annuelles à ceux qu'on aime et qui sont loin, qui ne font plus partie de notre quotidien mais à qui on aime écrire une fois l'an au moins pour ne jamais les perdre de vue, échanger des nouvelles, se promettre de se revoir, entretenir ces amitiés et souligner l'affection qui nous unit par-delà le temps qui passe. J'en reçois aussi beaucoup, il n'y a pas que Citifinancière qui sache comment me rejoindre, sinon, je n'irais plus jamais chercher mon courrier!
J'aime cuisiner des petits délices, les emballer joliment, les offrir, les partager ou les congeler pour les grands jours. L'odeur des pommes et de la cannelle, du pain qui lève ou qui cuit, des beignes à la vanille, du gâteau au rhum, embaument tour à tour la maison et la réchauffent autant que le poêle à bois. Parfois aussi, pour rien, comme ça, je jette dans l'eau bouillante sur le poêle à bois des branchettes de sapin ou des écorces d'orange, juste pour l'odeur.
Au chapitre de la musique, je suis assez difficile. Déjà que je ne peux pas choisir ce que j'entends à la radio... J'ai des cassettes de musique de mes « mononks », je les écoute un peu mais pas trop, parce que ça me vire à l'envers, c'est trop relié à mes souvenirs extraordinaires d'enfance, à ces Noël d'antan où le Père Noël n'existait même pas et que les maisons était pleines, dans le rang VII et au P'tit village, chez mes grands-parents des deux bords, avec les cousins et cousines, et cette musique qui faisait tellement partie de nous, de nos veillées...
J'ai un CD de la chorale de l'Accueil Bonneau, c'est écrit « 7 jours » dessus, je pense que ma mère l'avait eu avec le magazine et elle me l'avait donné parce qu'elle n'avait pas de lecteur CD dans le temps! J'ai même usé et donc brisé un CD que j'aimais beaucoup, « Hart Rouge chante Noël, avec la famille Campagne ». Trop trop beau. Toute une famille qui chante en harmonie... Faudrait que je le cherche dans les disques usagés à La Ressourcerie... Quand le père Campagne entonne le Minuit Chrétien, avec le reste de la famille qui fait des « back vocals », je vous mets au défi de ne pas avoir la voix qui flanche quand vous chantez avec eux!
Je ne décore pas la maison, ni à l'intérieur ni à l'extérieur, tant que je ne le sens pas comme une envie folle et pressante de tout sortir du gouffre sans fond où sont rangées nos vieilles décorations de Noël qui viennent de chez nos parents, de mes tantes religieuses décédées ou celles qu'Isabelle a fabriquées à l'école. Chez nous, chaque ornement du sapin a son histoire et on aime se les rappeler en faisant le sapin. Ça nous prend des heures et des heures! Avec petite Félixe (11 mois) dans nos vies, on risque de s'éxécuter plus tôt cette année, les enfants (Isa et Dom, avec la p'tite) viendront dormir ici ce soir-là, ils nous l'ont dit... Le lendemain, on déjeunera ensemble en gros pyjama, en admirant l'oeuvre de la veille. Juste à imaginer la frimousse de Félixe qui voudra toucher à tout et qui sera émerveillée, moi, c'est ben simple...
Oui, j'ai le coeur plus tendre en décembre, je ne le nie pas. Je me sens plus aimante, plus généreuse de mon temps et j'apprécie tous les petits gestes de bonté et de générosité de ceux qui m'entourent. Même le paysage se fait tout blanc, pur, serein, calme, illuminé d'une clarté qui vient d'en dedans. « Paix sur la Terre aux hommes et aux femmes de bonne volonté » qu'ils écrivaient dans les anciennes cartes de Noël. On ne voit plus ça... Est-ce qu'il y a encore quelqu'un qui trouve que cette phrase a du sens aujourd'hui? Moi oui. Peut-être que finalement, je crois encore un peu au Père Noël?