Ce n’est pas moi qui ai pris cette photo, évidemment… C’est Nathalie, sa marraine, à l’été 1987. Isa avait 9 mois et je célébrais tout juste mes 30 ans. S’il vous semble qu’il n’y a pas de lien entre le titre, la photo et le billet que je m’apprête à écrire, attendez pour voir, parce que dans mon cœur, tout est lié.
Pourquoi écrire?
Dernièrement, deux événements en lien avec l’acte d’écrire sont venus ébranler mon « feu sacré », ce goût de fixer sous ma plume les visions aperçues à l’heure fugitive de l’inspiration. Ce n’est pas la première fois que ça m’arrive et ça risque de se produire encore. Bien sûr, je gagne ma vie de cette manière, puisque dans mon travail, j’ai à faire beaucoup de rédaction mais je parle ici d’écrire à partir de mon espace à moi, en dehors de mon travail. Écrire librement, sans contrainte ni obligation, par plaisir ou par besoin. L’acte d’écrire. Pourquoi?
Le premier événement que j’ai beaucoup observé et auquel j’ai participé en allant voter et voir les résultats, c’est ce gala des Blogues d’or, une heureuse initiative très québécoise qui voulait récompenser des blogues dans plusieurs catégories. J’y ai découvert, parmi les blogues proposés, des talents incroyables, d’une richesse et d’une variété insoupçonnées, tant dans le contenu, la forme, les tendances, l’esthétisme, la technologie de pointe et le multimédia, une pluralité des genres et des sujets. Je me suis sentie très loin et pas rapport du tout dans cet univers. J’étais émerveillée mais en même temps, complètement dépassée par ce monde de l'auto publication virtuelle qu’on appelle la blogosphère.
Le deuxième, c’est le Salon du livre de l’Abitibi-Témiscamingue qui avait lieu en fin de semaine dernière, à La Sarre. Notre Salon du livre a ceci de particulier qu’il est baladeur, puisqu’il se déplace d’une ville à l’autre à chaque année. Dans l’ordre, il se déroule à La Sarre, Amos, Val-d’Or, Rouyn-Noranda et Ville-Marie. C’était la 32e édition et je n’en ai pas raté beaucoup en 32 ans. J’ai même coordonné la 26e édition, à Rouyn-Noranda, j’en connais donc tous les dessous. Cet univers est tout à fait le mien... d'habitude.
Les écrivains d’ici, je les ai côtoyés depuis longtemps dans le défunt Regroupement des écrivains et auteurs de l’Abitibi-Témiscamingue. Je les ai présentés souvent aussi, alors que j’animais les Cafés littéraires. Quand j’étais écrivain public, ils me considéraient comme l’une des leurs. J’en ai découvert d’autres encore quand je travaillais au Conseil régional de la culture. Plusieurs sont des amis de longue date.
Quand je vais au Salon, je les revois à peu près tous. Ce sont toujours des retrouvailles joyeuses, animées, parfois émouvantes pour moi, parce que je m’y retrouve comme en pays de connaissance, auprès de gens avec qui j’ai beaucoup vécu et partagé, c’est difficile à expliquer.
Cette année, ça a été très différent. Oui, je les ai revus, ils m’ont dédicacé leur p’tit nouveau, m’ont raconté comment ils en étaient venus à publier celui-là, les difficultés qu’ils avaient dû surmonter, etc. Et puis, chaque fois, à la fin de nos conversations, beaucoup plus par politesse que par un intérêt réel, cette question :
- Et toi, écris-tu encore?
- Oui, c’est sûr, il faut bien gagner sa vie!
- Mais est-ce que tu publies tes écrits personnels?
- Oui, sur mon blogue!
- … (Malaise)
- En tout cas, je suis content de t’avoir vue, j’ai hâte que tu me lises, que tu m’en redonnes des nouvelles!
Publier sur un blogue, ça ne compte pas. Pas grave. Je m’en doutais pas mal. C’est encore moins bien perçu que de publier à compte d’auteur, c’est tout dire. Le pire, c’est que j’ai réalisé cette fois-ci que chez tous les écrivains de mes amis, ceux qui m’invitent à leur lancement comme ceux qui m’amènent par la main en courant vers le stand de leur maison d’édition, il y a une constante : Ils veulent tous que je les lise mais ils n’ont aucun intérêt à me lire. Je ne suis plus l'une des leurs, je suis une lectrice amie, bon public, c'est tout. Alors, pourquoi écrire?
Un élément de réponse venu de loin
Pourquoi écrire? Je n’aurai jamais de réponse à cette question-là. Mais un élément nouveau s’est présenté, venu de si près et de si loin en même temps. En vous le racontant, j’amène jusqu’à vous, chères âmes généreuses qui me lisez ici, une nouvelle que nous et nos proches partageons déjà depuis un bon moment.
Pour vous mettre dans le contexte, Isabelle et Dominic, dont je vous ai déjà parlé, sont en voyage pour 5 semaines en Espagne, au Maroc et au Portugal. Plus que jamais, nous avons eu besoin de garder bien vivant notre lien, et c’est directement des différents cafés Internet de Essaouira, Agadir et Taroudant, au Maroc, que me sont parvenus cette semaine les plus beaux écrits que j’ai pu lire de toute ma vie.
Dans un de ses messages, Isa me raconte une histoire très touchante. Les petits Marocains de ce village demandent la charité pour leur famille. L’un d’eux qui l’observait écrire dans son carnet de voyage, lui a chaviré le cœur, particulièrement. Elle avait dû lui faire signe que non, elle n’avait plus de monnaie sur elle mais elle aurait tellement voulu lui donner de l’argent, à lui spécialement, à cause de la manière dont il s'intéressait à elle, qu'il la regardait écrire. C’est alors qu’il lui a dit dans un français approximatif : « Pas l’argent, pas l’argent, madame, votre crayon madame, pour l’école ».
Elle lui a tendu son crayon pour qu'il écrive dans son carnet de voyage qu’elle lui tendait. À partir de là, je la laisse parler :
Pourquoi écrire?
Dernièrement, deux événements en lien avec l’acte d’écrire sont venus ébranler mon « feu sacré », ce goût de fixer sous ma plume les visions aperçues à l’heure fugitive de l’inspiration. Ce n’est pas la première fois que ça m’arrive et ça risque de se produire encore. Bien sûr, je gagne ma vie de cette manière, puisque dans mon travail, j’ai à faire beaucoup de rédaction mais je parle ici d’écrire à partir de mon espace à moi, en dehors de mon travail. Écrire librement, sans contrainte ni obligation, par plaisir ou par besoin. L’acte d’écrire. Pourquoi?
Le premier événement que j’ai beaucoup observé et auquel j’ai participé en allant voter et voir les résultats, c’est ce gala des Blogues d’or, une heureuse initiative très québécoise qui voulait récompenser des blogues dans plusieurs catégories. J’y ai découvert, parmi les blogues proposés, des talents incroyables, d’une richesse et d’une variété insoupçonnées, tant dans le contenu, la forme, les tendances, l’esthétisme, la technologie de pointe et le multimédia, une pluralité des genres et des sujets. Je me suis sentie très loin et pas rapport du tout dans cet univers. J’étais émerveillée mais en même temps, complètement dépassée par ce monde de l'auto publication virtuelle qu’on appelle la blogosphère.
Le deuxième, c’est le Salon du livre de l’Abitibi-Témiscamingue qui avait lieu en fin de semaine dernière, à La Sarre. Notre Salon du livre a ceci de particulier qu’il est baladeur, puisqu’il se déplace d’une ville à l’autre à chaque année. Dans l’ordre, il se déroule à La Sarre, Amos, Val-d’Or, Rouyn-Noranda et Ville-Marie. C’était la 32e édition et je n’en ai pas raté beaucoup en 32 ans. J’ai même coordonné la 26e édition, à Rouyn-Noranda, j’en connais donc tous les dessous. Cet univers est tout à fait le mien... d'habitude.
Les écrivains d’ici, je les ai côtoyés depuis longtemps dans le défunt Regroupement des écrivains et auteurs de l’Abitibi-Témiscamingue. Je les ai présentés souvent aussi, alors que j’animais les Cafés littéraires. Quand j’étais écrivain public, ils me considéraient comme l’une des leurs. J’en ai découvert d’autres encore quand je travaillais au Conseil régional de la culture. Plusieurs sont des amis de longue date.
Quand je vais au Salon, je les revois à peu près tous. Ce sont toujours des retrouvailles joyeuses, animées, parfois émouvantes pour moi, parce que je m’y retrouve comme en pays de connaissance, auprès de gens avec qui j’ai beaucoup vécu et partagé, c’est difficile à expliquer.
Cette année, ça a été très différent. Oui, je les ai revus, ils m’ont dédicacé leur p’tit nouveau, m’ont raconté comment ils en étaient venus à publier celui-là, les difficultés qu’ils avaient dû surmonter, etc. Et puis, chaque fois, à la fin de nos conversations, beaucoup plus par politesse que par un intérêt réel, cette question :
- Et toi, écris-tu encore?
- Oui, c’est sûr, il faut bien gagner sa vie!
- Mais est-ce que tu publies tes écrits personnels?
- Oui, sur mon blogue!
- … (Malaise)
- En tout cas, je suis content de t’avoir vue, j’ai hâte que tu me lises, que tu m’en redonnes des nouvelles!
Publier sur un blogue, ça ne compte pas. Pas grave. Je m’en doutais pas mal. C’est encore moins bien perçu que de publier à compte d’auteur, c’est tout dire. Le pire, c’est que j’ai réalisé cette fois-ci que chez tous les écrivains de mes amis, ceux qui m’invitent à leur lancement comme ceux qui m’amènent par la main en courant vers le stand de leur maison d’édition, il y a une constante : Ils veulent tous que je les lise mais ils n’ont aucun intérêt à me lire. Je ne suis plus l'une des leurs, je suis une lectrice amie, bon public, c'est tout. Alors, pourquoi écrire?
Un élément de réponse venu de loin
Pourquoi écrire? Je n’aurai jamais de réponse à cette question-là. Mais un élément nouveau s’est présenté, venu de si près et de si loin en même temps. En vous le racontant, j’amène jusqu’à vous, chères âmes généreuses qui me lisez ici, une nouvelle que nous et nos proches partageons déjà depuis un bon moment.
Pour vous mettre dans le contexte, Isabelle et Dominic, dont je vous ai déjà parlé, sont en voyage pour 5 semaines en Espagne, au Maroc et au Portugal. Plus que jamais, nous avons eu besoin de garder bien vivant notre lien, et c’est directement des différents cafés Internet de Essaouira, Agadir et Taroudant, au Maroc, que me sont parvenus cette semaine les plus beaux écrits que j’ai pu lire de toute ma vie.
Dans un de ses messages, Isa me raconte une histoire très touchante. Les petits Marocains de ce village demandent la charité pour leur famille. L’un d’eux qui l’observait écrire dans son carnet de voyage, lui a chaviré le cœur, particulièrement. Elle avait dû lui faire signe que non, elle n’avait plus de monnaie sur elle mais elle aurait tellement voulu lui donner de l’argent, à lui spécialement, à cause de la manière dont il s'intéressait à elle, qu'il la regardait écrire. C’est alors qu’il lui a dit dans un français approximatif : « Pas l’argent, pas l’argent, madame, votre crayon madame, pour l’école ».
Elle lui a tendu son crayon pour qu'il écrive dans son carnet de voyage qu’elle lui tendait. À partir de là, je la laisse parler :
« Dire non à un enfant, c'est encore plus difficile... Celui d'aujourd'hui était différent des autres... Je pouvais sentir chez lui une grande volonté de savoir écrire dans ses jolis barbouillages faits de sa petite main, me rappelant mes propres gribouilles d’avant la première année... mais pour ce petit bonhomme, Maman, il n’y aura pas de première année. Je lui ai donné mon super stylo, en me disant que pour moi comme pour lui, un crayon représente en lui-même une possibilité infinie. Merci Maman, pour ce goût d’écrire, tu m’as outillée pour la vie, je ne serai jamais seule… »
Je ne partagerai pas l’ensemble de son message mais je me permettrai de vous retranscrire une partie de ma réponse :
Je ne partagerai pas l’ensemble de son message mais je me permettrai de vous retranscrire une partie de ma réponse :
« Papa se joint à moi dans ce message. Je sais que tu aurais aimé qu’il puisse te répondre mais comme tu le dis toi-même, il n’est pas très courriel. Tu sais aussi qu’il ferait tout pour nous. Il faut l’aimer comme il est, avec son cœur grand comme le monde! Il communique avec les outils qu’il a : son cœur, ses sourires, ses grandes mains expressives, ses chansons décomposées, son humour, son temps et ses silences… »
... « Non, c’est vrai, faire la reposette, comme tu dis, alors qu’il y a tant à vivre, ça ne te ressemble pas du tout, tu as toujours eu tellement d'énergie, comme ton Papa, c'est-à-dire que tu ne connais aucune limite. Dominic a raison, c’est fascinant mais très exigeant de fabriquer un petit être humain. C’est même phénoménal. Un voyage intérieur, en quelque sorte. Petit Mini, comme vous l’appelez, a beau avoir été conçu dans l’amour, on sait bien, toi et moi, que l’amour, c’est ben d’l’ouvrage! »...
... « Non, c’est vrai, faire la reposette, comme tu dis, alors qu’il y a tant à vivre, ça ne te ressemble pas du tout, tu as toujours eu tellement d'énergie, comme ton Papa, c'est-à-dire que tu ne connais aucune limite. Dominic a raison, c’est fascinant mais très exigeant de fabriquer un petit être humain. C’est même phénoménal. Un voyage intérieur, en quelque sorte. Petit Mini, comme vous l’appelez, a beau avoir été conçu dans l’amour, on sait bien, toi et moi, que l’amour, c’est ben d’l’ouvrage! »...
... « Je n’en reviendrai jamais du miracle de la vie. Peut-être parce que pendant huit ans, j’ai eu amplement le temps de décortiquer tout ça, d’espérer tant de fois et de réaliser au moins une fois ce rêve. Je te l’ai dit souvent, tu es la plus magnifique chose qui me soit arrivée dans la vie. »...
... « Qu’on puisse, rien qu’en s’aimant, donner vie à une personne et vouloir le meilleur en tout pour cette personne-là, ça amène mon âme à une telle émotion que je n’ai plus de mots. Et là, c’est vous deux qui vivez ça, vous deux que j’aime tant. Vous deux qui êtes en train de devenir trois… »
... « Nous avons eu si peu de temps avant votre départ, tout ça était tellement soudain, inattendu, en même temps que vos derniers préparatifs, les ajustements, urgences de dernière minute et contraintes extérieures... J’ai eu besoin de te serrer très fort et très longtemps dans mes bras avant que tu partes, j’aurais voulu te communiquer quelque chose… J’étais incapable de trouver les mots mais j’aurais eu tant à te dire, si tu savais. Sur la beauté et la force de la vie, bien sûr, mais plus encore au sujet de ces autres sentiments si forts qu’on ressent quand le miracle s’est produit et qu’on porte un enfant. J’aurais voulu te prendre en otage, rien qu’une petite heure, t’amener sur mon île secrète, dans ma maison mère imaginaire, juste une petite heure de rien, pour que tu me parles, pour que je t’écoute, pour qu’ensemble on se rassure… Heureusement qu’il y a les mots, ceux que je peux t’écrire même à l’autre bout du monde, ceux que je DOIS t'écrire parce que je ne peux pas les exprimer autrement… »
Pourquoi écrire?
« Pour n’être jamais seule », c'est elle qui me l’a écrit, de Essaouira, au Maroc, Isa qui sera Maman... en compagnie de Dominic qui sera Papa. Et moi, j'ajoute mon nouvel élément de réponse au sien : Pourquoi écrire? Parce que ça nous rapproche, et ça, c’est une possibilité infinie...
Pourquoi écrire?
« Pour n’être jamais seule », c'est elle qui me l’a écrit, de Essaouira, au Maroc, Isa qui sera Maman... en compagnie de Dominic qui sera Papa. Et moi, j'ajoute mon nouvel élément de réponse au sien : Pourquoi écrire? Parce que ça nous rapproche, et ça, c’est une possibilité infinie...