dimanche 17 mars 2013

Réflexion du dimanche


Difficile de la voir, notre maison actuelle, à travers tous ces arbres qui l'entourent en toutes saisons. Je l'ai fait exprès pour ne pas tomber dans la nostalgie. Ça fait partie de mon processus de détachement qui s'est intensifié depuis qu'elle est à vendre.  


À chaque fois que j'ai vu apparaître de ma cuisine le phénomène de parhélie (les trois soleils) j'ai été propulsée dans une réflexion sur le sens que je voulais donner, ce jour-là, à n'importe quel nouveau départ.


Il y a deux semaines, lors de la soirée Clair de lune au Centre de ski de fond où sont membres nos enfants, nous avons retrouvé là-bas les parents de Dominic, qui sont plus que des amis, nous nous considérons comme des membres d'une même famille depuis cinq ans que nos enfants sont mariés ensemble et plus encore depuis la naissance de notre Félixou!


Un beau jour d'été au P'tit Château à Rapide Deux. Si le campe a été baptisé depuis le début le P'tit Château, ce n'est pas juste pour rigoler qu'on dit ça, on y est heureux simplement avec ceux qu'on aime et en ce sens, oui, on fait là une vraie vie de château. 

Réflexion du dimanche

D'abord, je vous annonce officiellement que notre maison est vendue au lac Dufault. Notre courtier immobilier a fait de l'excellent travail. Nous sommes très contents du dénouement rapide et heureux. Nous partirons d'ici le 8 avril prochain et la transaction devrait se signer devant notaire le 12 ou le 15, moment où nous remettrons les clés au nouveau propriétaire. D'ici là, nous prendrons les bouchées doubles pour terminer les rénovations à l'autre maison que nous avons achetée à Rouyn-Noranda. 

Depuis un bon moment déjà, je réfléchis à la question suivante : C'est où chez nous? 

Ce matin, j'ai ma réponse : Chez nous, c'est là où nous avons des projets, où nous sommes heureux, où nous l'avons été et où nous avons bien l'intention de continuer à l'être. Le reste, ça s'appelle un décor et il n'est qu'accessoire. 

Isabelle avait raison lorsqu'elle m'a dit dernièrement que des beaux souvenirs, on allait devoir s'en fabriquer d'autres et qu'on avait tout ce qu'il fallait pour le faire. Elle est devenue si grande, notre petite qui a grandi ici, sur le bord du lac... 

Nous avons tant de projets. Et nous aurons du temps pour les rêver, les mettre de l'avant, les organiser et surtout pour les vivre. 

Je m'en vais dans la prochaine heure chercher Félixe et nous allons ensemble voir un beau spectacle de cirque au Théâtre du Cuivre. On a tellement hâte, elle et moi. Après, nous serons réunis tous ici avec ses parents et son Papi, le souper est déjà prêt, je l'ai cuisiné hier soir et ce qui sera notre dernier souper de famille ensemble dans cette maison n'aura pas du tout l'air triste parce que nous savons que nous en aurons bien d'autres ailleurs, dans d'autres décors. 

Chez nous, c'est partout où se trouvent ceux qu'on aime. 

J'ai quelques amis autochtones, des Algonquins, qui m'apprennent beaucoup sur la vie et le monde qui m'entoure. Ils ont un concept de la maison, de la propriété, qui m'était tout à fait étranger jusqu'à ce que je les côtoie plus souvent. Ils habitent un endroit mais n'y sont jamais vraiment chez eux. Ils l'empruntent à leurs enfants et à leurs petits-enfants, en quelque sorte. Ils ont dû voir la chose sous cet angle probablement depuis toujours parce qu'on les a dépossédés de tout, à commencer par le territoire où ils avaient vécu en paix depuis des millénaires. Je les trouve sages de n'avoir jamais besoin de posséder un lieu pour y vivre sans souci. Ils ont aussi un rapport au temps et à la nature qui m'inspire de plus en plus. 


vendredi 8 mars 2013

Paperasseries


Mon bureau. Là où je suis présentement. Où j'ai exercé mon métier jusqu'au 31 décembre dernier. Où je prends mes courriels, où je lis d'autres blogues, où je fais certaines transactions, où j'entretiens mes amitiés et mes liens familiaux, pas juste mes amitiés Facebook. Là où je tombais si souvent dans la lune à cause de la grande porte patio et de la fenêtre à droite où j'allais tout le temps me perdre pour mieux me retrouver et explorer une foule d'avenues! 

Paperasseries

Avez-vous vu toute la rangée de dictionnaires et de manuels de conjugaison, de difficulté de la langue française, des citations, de traduction de l'anglais au français, grammaires, dictionnaire de la langue québécoise, du français au bureau, des synonymes, etc. C'est parce que plus je les consultais, plus je m'apercevais que je ne savais rien, que j'avais seulement un intérêt et une curiosité pour tout cela. Pendant longtemps, j'ai fait de la correction et de la révision de textes, et j'avais toujours le syndrome de l'imposteur parce que je n'avais jamais fait d'études dans ce domaine précis.  Mais depuis que je ne travaille plus, (je n'ai jamais autant travaillé mais à mon rythme) on dirait que j'ai abandonné tous mes « aidants naturels » de l'étage au-dessus de mon ordinateur! 

J'avais mon rendez-vous annuel avec ma comptable en début de semaine. On se connaît depuis longtemps, elle et moi. La confiance règne. On peut tout se dire. Je lui apprenais avec enthousiasme que j'avais fermé mon entreprise à la fin de l'année 2012, comme elle s'en rendrait compte en faisant ses vérifications comptables et mes déclarations d'impôt. J'aimais mieux lui dire de vive voix, répondre à ses questions si elle en avait et me guider s'il y avait autre chose à faire pour que tout devienne officiel et irrévocable, du point de vue légal et comptable. Elle s'est montrée inquiète pour moi, la pauvre. Je l'ai bien rassurée!!!

Comme ma petite entreprise était enregistrée et non pas incorporée, ça simplifiait beaucoup la chose, me disait-elle. Elle m'enjoignait au plus vite de remplir une déclaration de radiation au registre des entreprises et pour cela, j'avais besoin de mon code d'accès clicSÉQUR express, un document bleu de trois pages que j'aurais supposément reçu il y a quelques années et sur lequel j'allais trouver tout ce qu'il me fallait, comme des numéros de téléphone, des codes d'identification, des sites Internet, etc. Hein, quoi? J'ai jamais vu ça passer, moi. Je veux juste fermer mon entreprise, pas demander de subvention ni ouvrir une nouvelle succursale en pays étranger!

Une chance que je jette jamais rien. Surtout quand ça vient d'un Ministère. J'ai fini par retrouver le document bleu en question que j'avais bien sagement remis dans son enveloppe sans l'avoir lu, tellement je ne me sentais pas concernée le moindrement. C'était daté de décembre 2010. 

Alors, hier, avec acharnement et détermination, je me suis fait un deuxième café décaféiné, je me suis retroussé les manches et je me suis mise à l'oeuvre. Des bouts par téléphone et d'autres bouts par Internet. L'enfer!  

À la fin d'un paquet d'entourloupettes administratives, ma demande de radiation au registre des entreprises a été acceptée et j'ai un numéro de confirmation si jamais j'en avais besoin (Ne jamais sous-estimer les dédalles administratives d'un Ministère qui s'apparente à celui du Revenu particulièrement, j'ai appris ça depuis longtemps). Turbide Communications n'existe plus, ni légalement ni autrement. J'étais épuisée... 

Je me suis demandé si ça me faisait quelque chose, comme un petit pincement, un vague à l'âme, une nostalgie, un regret, un sentiment quelconque qui serait venu boucler la boucle de ces 40 années sur le marché du travail. Mais non. Rien. Vraiment rien. Ah peut-être un miiiiiiiiinuscule sentiment de soulagement de rien du tout mais pas tant que ça. Je me suis bien plus sentie soulagée au lendemain du 31 décembre. Pas hier. Non. Ah peut-être que... oui, si je veux être tout à fait franche, une seule pensée m'a traversé l'esprit tellement trop détaché en pensant à ma petite entreprise fermée.

Flashback : imaginez la petite musique de retour vers le passé avec de la brume tout le tour de l'écran...

Janvier 2005. Papa était à la Maison des soins palliatifs et nous passions beaucoup de temps ensemble, évidemment. Papa n'était jamais seul. Il savait depuis l'automne que je préparais mon retour comme travailleuse autonome et que j'avais déjà un gros contrat qui m'attendait dès que j'étais prête à foncer. À chaque fois que j'arrivais à sa chambre le matin, il me demandait des nouvelles de ma « business », ça l'emballait pour moi et ça lui faisait vivre des projets, lui qui ne pouvait plus en faire... Un bon matin, j'étais arrivée avec mes nouvelles cartes d'affaires que j'avais faites moi-même avec beaucoup d'application. Une bonne centaine que j'avais imprimées. Je les avais conçues sobrement mais de bon goût, réalisées par ordinateur et j'avais poussé le raffinement jusqu'à les plastifier, puisque j'avais la machine pour le faire. Papa avait trouvé qu'elles avaient de la classe, mes cartes d'affaires, et que Turbide Communications, c'était un beau nom, c'était le sien, celui qu'il m'avait donné et que je portais si fièrement. 

Il m'en avait demandé une qu'il avait affichée tout de suite sur le tableau de liège où nous avions piqué plusieurs de nos photos de famille, dans sa chambre à la Maison des soins palliatifs. Il l'avait mise là parce qu'il était fier. Et ça paraissait chaque fois qu'il la regardait et qu'il me souriait. Il me souhaitait tout le succès possible, dans ma job, dans ma vie, et d'être heureuse dans ma « business ». Il ne le disait pas comme ça mais on le comprenait comme ça, lui et moi.

C'est la seule pensée un peu émue qui m'est venue à l'esprit en fermant Turbide Communications, hier. Si Papa était encore là pour voir combien sereine je suis à la fermeture, encore plus qu'à l'ouverture, mon coeur me dit qu'il serait encore plus fier qu'il l'avait été en janvier 2005 et qu'il afficherait probablement cette fois sur le tableau de liège ma « déclaration de radiation au registre des entreprises du Québec ». J'aime penser qu'il la regarderait en me souriant...