Photos 1 et 2 : Vous souvenez-vous de la semaine dernière, quand une gélinotte huppée est venue parader devant moi pour me souhaiter une bonne Saint-Valentin? Une semaine plus tard exactement, ce qui se profilait à mon horizon, dans mon champ de vision, ne déclenche pas du tout les mêmes émotions...
Les envahisseurs
La voyez-vous, la cabane à pêche? Moi, je vois juste ça. Je l'ai dans la face à la journée longue depuis hier matin. Ça me pompe l'air. C'est rien ça, vous n'avez pas entendu la réaction de Crocodile Dundee quand il est arrivé de travailler hier. Il n'en croyait pas ses yeux lui non plus. Il s'est dit des gros mots là!
Le gars s'est installé en face de nos maisons. Nous sommes quelques-uns à l'avoir dans notre champ de vision mais sa façade est tournée plus particulièrement vers chez nous, comme s'il voulait nous espionner. On se sent envahis. De là, le nom qu'on leur donne, à ce genre de monde-là.
Vous allez me dire que le lac ne nous appartient pas. C'est vrai. On en prend soin depuis 20 ans, on paie des taxes foncières faramineuses pour habiter ici, on aménage en pensant environnement et faune, on l'a quasiment dans la maison, il fait partie de notre paysage, même intérieur, mais le lac, c'est vrai, il ne nous appartient pas.
Le lac Dufault, que j'appelle affectueusement « MON » lac est la source d'approvisionnement en eau potable pour la ville de Rouyn-Noranda et les environs. Ça devrait lui conférer un certain respect. Mais c'est pas le cas. Sauf pour quelques riverains.
Mon lac a quelques rivages habités mais pas beaucoup, grâce aux lois qui y ont vu pour mettre un frein il y a 25 ans au développement anarchique qui s'est arrêté là : le chemin des Voiliers, la rue Gagnon, l'avenue des Iles, le chemin des Castors, et le chemin England. C'est tout. Sa superficie est d'environ 8 km par 4 km. VOULEZ-VOUS BIEN ME DIRE CE QUI SE PASSE ENTRE LES DEUX ZOREILLES D'UN ENVAHISSEUR QUI VIENT S'INSTALLER AVEC SA CABANE À PÊCHE EN AVANT DE CHEZ NOUS, DANS NOTRE BULLE?
Il n'y a pas de loi qui nous protège de ça, les envahisseurs. Ils ne pensent à rien du tout, surtout pas aux autres. C'est quoi, la prochaine étape? Il va venir nous emprunter une tasse de sucre? Nous demander de venir faire pipi dans notre salle de bain? Ou pire encore, faire pipi dehors sur le lac en dessinant un signe de peace and love en jaune sur la neige blanche, en nous faisant beubaille? Il va s'apporter une boîte à musique qui crache à 120 décibels et nous imposer son boum boum? Y a pas de limite à la bêtise humaine!
Le gars travaille probablement. Il viendra pêcher la fin de semaine. Mais sa cabane, on l'a dans la face toute la semaine, nous autres. Ça y en fait tu, de la peine, lui? Simonac, on est en Abitibi, un pays d'espace et de liberté. C'est bien pour dire qu'on n'est pas à l'abri de rien, nous autres non plus, surtout pas des envahisseurs.
Ça me fait penser à une anecdote. Un fait vécu, comme disait l'autre. Nos amis Bob et Marie-Claude habitent chemin des Voiliers. Sur leur terrain en pente vers le lac, il y a des petites buttes qu'ils ont laissées au naturel, avec des arbres, des bleuets, etc. Un bon soir d'août, Bob arrive de travailler, il y a un bazou dans son stationnement et il voit un homme et une femme qui cueillent des bleuets dans sa cour. Toujours cool, mon Bob, il dit : « Une belle talle, hein? ». Les envahisseurs se sentent dérangés, ils opinent du bonnet mais ne rallongent pas le discours. Ils cueillent à pleines mains les beaux fruits mûrs et sucrés. Mon Bob se reprend, toujours enclin à faire un peu d'éducation : « C'est parce que vous êtes chez nous ici, vous voyez la maison blanche... ». Alors, les deux moineaux, insultés et arrogants, lui lancent : « Le bois, c'est à tout le monde ». C'est là que Bob a perdu son calme légendaire. Il les a escortés jusqu'à leur bazou, et bon garçon, il leur a laissé les bleuets, en leur disant que pour faire des tartes, ils avaient déjà une bonne base.
« J'overeact », je le sais, mais ça m'a fait du bien de vous en parler...
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Petite note ajoutée à 14 heures : La fin de l'histoire. Ça pourrait se titrer ainsi : La fois où j'ai pété ma coche pour rien, ou bien, Le steambath de mon voisin me donne des chaleurs, ou encore, C'est en parlant qu'on se comprend.
Bref, j'arrive de la ville tout juste. En face de moi dans le stationnement de l'épicerie, il y avait mon 3e voisin, Yvan, tout content d'être heureux de me dire qu'il s'en va à la pêche à la baie James pour trois jours. Je vous raconte notre conversation :
- En tout cas, tu vas avoir du beau temps pour partir!
- Mets-en!
- Pourquoi tu vas si loin, Yvan, en avant de chez vous, y en a qui pensent qu'ils sont à Ste-Anne de la Pérade?
- Ah tu parles de la cabane brune?
- Ouais, c'est ça, celui-là qui a une belle vue sur nos maisons...
- C'est la cabane à Ti-Blanc (le voisin entre nous deux) il veut se faire un steambath avec sa cabane à pêche!
- ...???... T'es sûr de ça?
- Tu pensais toujours ben pas qu'il y avait du monde assez épais pour venir s'installer collés sur nous autres de même, en face de chez nous?
- Ah nenon nenon, je pensais rien pantoute, je disais ça de même. Bonne pêche Yvan!
J'ai pas d'ego, je viens de vous le prouver. Mais comme il me reste encore un petit peu d'orgueil, je souhaite de tout mon ♥ que mes voisins ne lisent pas mon blogue. Sinon, ma nouvelle marotte, ça deviendra : « Je me fous du ridicule » et j'essaierai de me souvenir de ce que me disait ma mère quand j'étais petite : « Quand on ne vaut pas une risée... »
36 commentaires:
En tout cas ça fait un bon article. C'est difficile d'être vraiment chez-nous. Moi comme j'habite sur un coin de rue, il m'est arrivé d'arracher des pancartes d'agents d'immeubles sur mon terrain. Ils m'ont dit "il y a 3 pieds qui appartient à la ville" alors ils se croyaient tout permis. D'abord c'est faux la ville à droit d'acces, mais le terrain m'appartient et c'est moi qui l'entretien.Vivre en société c'est pas facile.
De l'ancien joutellois.
Peut etre votre propre cabane peinture en rose, avec des fleurs partout, une image d'un poisson sur une ligne de peche avec un gros 'X' dessus, ou meme mieux, percez des nouveau trous tout autour de la cabane, peut etre a chaque pied.. une peur que la fondaison de glace va briser? :-)
Bonne nouvelle annee en retard aussi.
J'peux ti te dire, que la steam va monter tantôt...
Pis pas à peu près à partde ça...
Quand une fille ne sait pas, elle ne sait pas ça faque peter une coche, des fois ça fait du bien pis tant pis pour ceux qui risent...
Zoreilles,
heureusement que tu ne vis pas à Montréal, car ta bulle se trouverait vraiment réduite, surtout dans le métro à l'heure de pointe; ça c'est le cauchemar absolu, et je ne veux même pas entrer dans les détails, tellement je suis écoeurée de le vivre quasi-quotidiennement.
Mais je comprends tout à fait le sentiment du propriétaire, qui voit son univers envahi; et moi je souhaite que tes voisins le lisent ton blogue, car ils découvriraient une personne merveilleuse.
:-)
@ Solange : Ouais, c'est bizarre ça, on te dit que t'es pas chez vous dans l'emprise de 3 pieds qui appartient à la ville mais l'agent d'immeubles, lui, se pense chez lui suffisamment pour installer sa pancarte! Quand c'est le temps d'entretenir et de nettoyer, c'est tu l'agent d'immeubles ou la ville qui va venir t'aider? J'ai pour mon dire que ma liberté s'arrête là où celle de l'autre commence. Et l'inverse est aussi vrai. En cas de doute, le respect devrait trancher. Mais c'est pas aussi simple, hein? ;o)
@ Le Joutellois : Allo toi! Long time no see. T'arrives avec ton sac à trucs, j'ai envie d'être dans ton équipe. Mais comme tu vois, j'avais pété ma coche pour rien. Au pire, je vais retrouver mon lac à la fonte des glaces...
@ Barbe blanche : Même si tu ris de moi, je te sens de mon bord. ;o)
@ Lise : Je le sais ben que je me plaignais pour rien, que mon côté territorial serait constamment frustré à Montréal, que ma bulle est trop grande, etc. Mais je suis née et j'ai grandi en Abitibi, que veux-tu, je suis pas prête à vivre ça autrement. Montréal, pour un court séjour, c'est parfait pour moi mais c'est pas le choix que j'ai fait pour vivre ma vie. Et puis, au final, je me choquais pour rien...
Zoreilles,
tu ne te choquais pas pour rien, et crois-moi je n'ai pas choisi de vivre à Montréal: je subis, en attendant des jours meilleurs, et de partir loin de cette ville.
On peut rêver...
Elle est bonne !! J'ai bien ri ! :-)
Et que dire de ces minières qui laissent leurs cochonneries trainées dans la vaste étendue du Nord après des forages infructueux. Tous ces barils d'essence vides et rouillés, laissés là près des plans d'eau.
J'en ai remarqué sur trois sites du haut des airs aujourd'hui même du côté de Kangirsuk. Je les compare à tes cabanes improvisées sur ton lac et dans ton environnement.
On n'est vraiment plus chez nous ...
Une chance que j'ai eu par la même occasion la joie de voir quatre boeufs musqués vaguabondant dans la montagne avoisinante.
Ah!Ah!Ah! T'aurais du m'entendre, à la fin de la lecture de ton billet, j'en ris encore, j'en pleure encore... En plus je pompais avec toi hihihihi! Je ne m'attendais pas du tout à cette belle finale!
la madame est fatiguée, elle va se coucher, hihihi!
xox Soisig
Tu fais ma journée! Tu m'as fait rire avec ta conclusion.
Bizarrement, ça arrive plus souvent qu'autrement (en tout cas moi...), qu'on s'emporte se croyant lésé pour finalement s'apercevoir qu'il y avait une explication toute simple...
Remarque que "steambath" ou pas...
Bonne journée à toi, Abitibienne pure laine!...
Très drôle!!!
Tout en lisant ton histoire, je me disais: "Crocodile Dundee devrait déblayer un peu et organiser une game de hockey un peu bruyante à côté de la cabane, avec sa gagne de chums...histoire de bien déranger le gars..."
Mais faut croire que ce n'est plus nécessaire...
C'est bien d'avouer ses erreurs, comme mon alzheimer d'ailleurs !
:-)
@ Lise : Oh oui, on peut rêver et il est bon de le faire, c'est le premier pas vers autre chose de mieux. Sans chercher la réalisation du grand rêve, on peut mettre de l'avant tout plein de petits rêves qui nous rapprochent du grand avec un grand R. Tu as déjà parlé des parcs, du Jardin Botanique, du Biodôme. Moi, j'aime bien flâner dans le Vieux Port, au bord du fleuve, j'ai déjà même assisté à des fêtes de quartier à Montréal et le Marché Jean-Talon, c'est mon péché mignon! Ma fille connaît plein d'endroits charmants à Montréal, ils y étaient encore en fin de semaine dernière, avec Dominic, ils y ont déjà leurs habitudes...
@ Guillaume : Mouéssi! Ça fait du bien, un peu de légèreté...
@ Le factotum : T'as raison, c'est exactement la même chose, à petite ou à grande échelle, les envahisseurs nous privent de notre bien et de notre liberté. Des boeufs musqués? Est-ce que tu survoles le territoire, toi? Tu dois en voir, des affaires que les médias ne nous montrent jamais?
@ Soisig : Je suis contente si je t'ai fait décrocher de tes responsabilités et obligations. T'as fait bon dodo? Après un petit massage de la rate (le rire) il paraît qu'on dort bien ♥
@ Fitzsou : Ça a dû t'arriver déjà sur ton lac? ;o) Je me choque si peu souvent, ça me demande une énergie incroyable, c'est pas dans moi, alors, quand je me rends compte que j'ai pompé l'air pour rien, je me trouve tellement... ridicule!
@ Claire : T'as plein de bons trucs, toi? Drôles, pas agressifs du tout, et le message passe, j'aime bien ta façon de te défendre des envahisseurs. Crocodile Dundee serait du genre à se mettre chum avec le gars de la cabane après une heure, le faire jouer dans son équipe! Il pète les plombs facilement quand on envahit son territoire mais il a le coeur tendre aussitôt qu'il se sent respecté. T'aurais dû lui voir la tronche quand je l'ai informé hier soir que c'était la cabane à Ti-Blanc!!!
@ Crocomickey : C'est à toi que je pensais d'ailleurs, tu m'inspires, tu es capable de rire de toi-même.
Tu viens de faire journée ! Je souriais déjà en imaginant le gars se tortiller pour écrire peace love mais la fin m'a fait rire aux éclats ! Elle est trop bonne !
Youpi, bravo, Zoreilles! Hourra pour Zoreilles, la guerrière!
Quand tu pètes ta coche, tu es à ton meilleur. J'ai vécu des émotions intenses en te lisant, haussant les épaules, soupirant, me frottant tantôt les sourcils, tantôt le front.
C'est bon de rire et la finale est bien amusante. Mais ce qui fait rire le mieux, ce sont de vrais émotions. Tout ce que cette cabanane symbolisait, ça existe vraiment.
On le sent ici aussi. La Côte-Nord et l'Abitibi, c'est comme deux jumeaux aux limites extrêmes du Québec. Nous sommes dans nos derniers vrais retranchements, collés à la nature. Et ça, on ne veut pas que personne ne vienne nous l'enlever.
Ce sentiment très fort, il faut vivre ici pour savoir ce que ça veut dire. Ce calme, cette tranquillité, on veut la protéger.
Mais on sait qu'un jour, subtilement, la "civilisation" viendra se pointer à notre porte avec ses bruits, ses effronteries, ses manques de respect, ses frontières naturelles qu'on ne respecte plus. On réclamera des accomodements. Et on regrettera les beaux jours où la nature était notre meilleure voisine installée dans notre cours beaux temps, mauvais temps.
Et oui, dans mon travail, je survole régulièrement les 24 villages autochtones du Nord.
Ces boeufs musqués, des merveilles avec leur épaisse toison hivernale.
Oh, que j'en vois des choses du haut des airs ... oh la la, à faire grincer les dents.
Un jour pas très lointain, peut-être, pourrais-je ...
L'épilogue est hilarant! Félicitations pour votre honnêteté littétaire! Rire de soi-même est un signe de santé.
Je ne comprenais pas votre rage envers cette modeste installation, me disant que votre propre demeure n'est quand même pas l'oeuvre de la nature! Et si ces pêcheurs peuvent vous voir, vous pouvez aussi les voir. Divertissement assuré! Ne vous fachez pas, une colère c'est bien mais deux c'est trop!
Autrefois, ma maison jouxtait une terre agricole. Quel plaisir d'être le dernier de la rue, aucune circulation. Un jour, la municapilité décida de construire d'autres maisons. Mon voisin d'alors me proposa de signer une pétition contre le projet sous prétexte qu'il ne fallait pas construire sur d'aussi bonnes terres agricoles. Je lui ai demandé:
- Et nos maisons, ne furent-elles pas constuites sur ces mêmes terres?
Cette quetsion mit fin à nos cordiales relations. Comme je n'apprécie pas les amis, je m'en suis trouvé heureux.
À Mont-Saint-Hilaire, tout le monde veut préserver la nature mais personne ne veut démolir sa maison pour rendre sa terre à la nature!
Blague à part, on s'habitue rapidement à un environnement comme le vôtre. Je devine votre choc en appercevant cette cabane.
Maintenant, imaginez ce qui se passe en Montérégie (et ailleurs). Pensez à ces gens qui habitent un joli coin de pays, sur une terre pittoresque leur appartenant et qui se lèvent et voient des camions et autres équipements lourds s'installant sur leur propre terrain et qui forent tout en risquant de polluer la nappe d'eau sous terraine pour exploiter le désormais célèbre gaz. Et en toute légalité!
Sans parler de ce qui se passe partout ailleurs! Ouf!
Accent Grave
Zoreilles, sur mon lac il y a en permanence une trentaine de cabanes... dont une dizaine finissent par échouer dans MA COUR pour plusieurs semaines au printemps...
Avantage de Kuujjuaq: je ne vois plus rien de ça depuis deux hivers!!!
(même certains s'amusent à donner du poisson cru à mon chien... tu sais ce que sent un chien qui mange du poisson toi?... Ça pue en tabarouette!!!!e)
@ Nicole : Rire, c'est la santé, Nicole... Je voudrais t'écrire un billet par jour, rien que pour toi! ;o)
@ Jacks : T'as tout compris, il m'arrive de vouloir traiter de sujets lourds de façon plus légère, en les transposant à petite échelle. Richard Desjardins me l'a déjà écrit noir sur blanc, c'est dans le particulier qu'on rejoint l'universel. À plus grande échelle, les envahisseurs, ce sont toutes ces entreprises (même des sociétés d'état) qui envahissent notre territoire et exploitent nos richesses sans aucune considération pour ceux qui s'y sont fait une vie, sans consultation véritable et sans compensation. Je ne suis pas guerrière pourtant, je m'identifierais plutôt à une louve, la notion de territoire, pour moi, c'est aussi fort que la meute. J'ai parfois besoin de me reconnaître dans le propos des gens des régions qui défendent une rivière, un fleuve, une île, un archipel, une terre, un esker, une montagne, un coin de pays ou de sous-sol, une langue, une culture, etc. Je m'essouffle facilement à crier dans le désert de l'indifférence... J'aimerais mieux ne pas m'en mêler, je suis très consciente que je ne verrai pas les conséquences de ça de mon vivant. Pas le pire, du moins. Mais je ne peux abandonner quand je pense aux générations qui nous suivent. Elles ont pour moi un visage maintenant...
@ Le factotum : Laisse-moi compléter ta phrase... « Un jour pas très lointain, peut-être, pourrais-je ... » ... vous en parler sur mon blogue? À ça, je te réponds : « T'es pas game! », je serais une fan fidèle et assidue!
@ Accent Grave : S'il y a quelqu'un qui peut comprendre les réactions et les inquiétudes des gens en Montérégie (et ailleurs) qui se sentent menacés par l'exploitation des gaz de shiste, c'est bien moi. Vous savez, la notion de territoire que j'ai tatouée jusqu'au fond de l'âme, elle ne s'arrête pas à l'Abitibi-Témiscamingue. Mais c'est ici que je vois les cicatrices de ces blessures qu'on inflige à nos paysages et notre avenir. J'ai grandi dans des villes minières, j'ai respiré ça toute ma vie, je vois encore se produire les mêmes phénomènes. C'est pareil quand on dénature la rivière Rupert, la Eastmain et tellement d'autres. Quand on donne notre eau des eskers aux Américains sans aucune redevance, même pas les emplois qui vont avec. Et les forestières qui bousillent tout sur leur passage, je le vis à notre camp. Mais je suis tout autant solidaire avec le Québec tout entier, qu'on parle de La Romaine sur la Côte-Nord, du gaz de shiste près des plans d'eau et sur les terres, du gisement Old Harry près des Iles de la Madeleine, de l'île d'Anticosti, etc. Mon territoire, c'est le Québec tout entier. Sur un ton léger, j'ai voulu parler des envahisseurs mais en dessous de ça, il y avait tous ces affronts qu'on fait subir à mon pays et à ceux qui l'habitent.
@ Fitzsou : Au moins, en allant travailler à Kuujjuak, t'as pu te sauver des envahisseurs. Ils prennent vraiment possession de ton chez vous. En plus, ils décident de l'alimentation de ton chien! T'es tolérante... On dirait un ange, je dirais même un ange aérien!
@ Accent Grave : Excusez-moi, j'avais perdu pas mal de ma légèreté là! Je sens le besoin de vous revenir avec plus de calme ;o) C'est que vous avez soulevé des arguments très vrais. On pourrait s'en parler longtemps... Cette petite cabane à pêche devant chez moi, ça n'est rien, j'en conviens. Mais c'est représentatif d'autre chose de bien plus grave. Dernièrement, à cause du développement minier, on rit de nous autres en pleine face, gens d'ici, et personnellement, nous avons été touchés aussi par l'envahissement de Eacom, une grande forestière, qui vient tout raser la forêt boréale autour de nos camps, et sur un très vaste territoire, c'était là notre dernier retranchement, il y passe quasiment une autoroute qui amène son lot d'envahisseurs, de l'exploration minière aux voleurs de camps. J'ai peut-être trop vécu de près le sentiment d'être envahie chez nous et de tout perdre. En réagissant très fort à cette cabane à pêche qui apparaît dans mon paysage visuel, j'ai comme qui dirait voulu tuer un maringouin avec une bombe nucléaire.
Les gens croient encore qu'il y a de l'espace ici, du territoire, de la nature à profusion mais ce n'est plus vrai. Il faut vivre ici pour s'en rendre compte. Même plus au nord que l'Abitibi-Témiscamingue, dans la région Nord-du-Québec, plus rien ne nous appartient, à nous, Québécois. On s'approprie notre pays sans qu'on réagisse. Nos dirigeants, le gouvernement Charest en tête, sont complices de cette dépossession, c'est de l'invasion de domicile grave. Tout ça s'organise en douce au profit ceux qui n'ont pas de respect pour nous. Et là, je parle de nous, Québécois.
Et pour terminer sur une note vraiment très légère, votre voisin de l'époque croyait encore aux pouvoirs d'une pétition? Hé bien, je vois qu'il y en a qui sont encore plus naïfs que moi!
Très honnête de ta part d'avoir rajouté la petite note...
Ça n'empêche pas que les envahisseurs existent.
Tiens, un exemple tout frais. Hier soir un touriste s'est pointé au motel où je travaille et il semblait trouver ''scandaleux'' le fait que nous n'avions plus de Journal de Montréal disponibles.
Il nous a prit pour des tarés, j'en suis convaincu.
On aurait voulu faire une scène comique dans un scénario télé, on n'aurait pu faire mieux....
Je me garde ça en réserve, on ne sait jamais, ça pourrait servir!
:)
@ Guy : Honnête? Ouais peut-être, c'est une question d'habitude, ça m'arrive tellement souvent de pas avoir raison! Mais le temps que j'y crois, j'y crois solide par exemple pis t'as besoin de te lever de bonne heure et d'avoir des arguments brillants pour me faire changer d'idée. Mets-en qu'ils existent, les envahisseurs... Je ne sais pas si c'est pareil pour toi, mais moi, quand un taré me prend pour une tarée, ça s'annule, ça me fait comme un compliment, un p'tit velours!!! ;o)
@ Talou : Toi, t'as comme un rapport secret avec l'écriture d'une série télé, hein? Un jour, tu vas nous dévoiler le pot-aux-roses? Avant que ce soit en ondes, j'espère? On aurait droit à un scoop il me semble! ;o)
Ah que c'est intéressant. Il m'est souvent arrivé ce genre de situation, où je sens la colère monter en moi face à une situation qui s'avère complètement différente de ce que j'avais initialement imaginé. Comme quoi, il y a toujours un écart entre notre perception et la réalité.
Tu sais, je ne sais pas comment tu fais pour ton campe et ses environs. Ça me rendrait vraiment ma-la-de. Je peux comprendre même une fausse peur de ce côté-là.
Et ce truc, il ne restera pas là tout le temps, si j'ai bien compris?
Zed
@ Air Fou
Il n'y restera sûrement pas ... après la fonte des glaces !
:-)
Zoreilles et Accent
Oui, bien sûr, le raisonnement de on l'a fait aussi, sauf que je crois sans doute comme vous qu'il faut faire des choix et qu'avant de briser des terres et du paysage, vaudrait mieux avoir d'autres plans et arguments que ceux qui remplissent le portefeuille de quelques-uns et vident les autres de tout ce qu'ils « avaient » (mais a-t-on jamais quelque chose).
Dans la campagne où j'ai longtemps résidé, alors que des maisons étaient abandonnées et d'autres à vendre dans le village, on a voulu faire de même autour de chez moi, hors du village. J'ai refusé et j'ai gagné. Je n'ai aucune raison d'avoir une habitation là s'il n'y a plus que des inconvénients car il y en a déjà à la pelle.
Crocomickey
Oups!
Je n'avais pas réalisé qu'il était sur la glace!
Doit bien y avoir une multinationale qui a pense à investir dans la glace éternelle pour se faire des « sous »... Non?
Zed ¦)
@ Le factotum
Un jour pas très lointain, peut-être, pourrais-je ...
Mois aussi je veux ma carte de membre si tu ouvres un blogue. Tu devrais. J'adorerais. Tu as une chance en or, un travail qu me semble passionnant. Tu dois savoir beaucoup de choses fort pertinentes dans notre contexte.
@Zoreilles,
Go! Go! Go! Faut pas lâcher, Zoreilles. Tu as raison et il ne faut surtout pas te retenir. Tu fais bien de brasser la cage. Et ça tombe bien, tu as la plume bien aiguisée, de la crédibilité, de l'impact. C'est évident. Il y a toujours plein de mondes qui s'exprime ici. J'ajouterais que tu attires un public de haut niveau au plan de la réflexion. Il y a toujours de l'intensité. Et parfois un peu de folie et souvent de belles émotions.
@ Pierre : Ce que ça raconte de nous aussi, c'est à quoi on tient beaucoup : respect, liberté de l'autre, considération pour l'entourage, justice, franchise, etc. La réaction est forte quand la blessure est profonde. Autrement, moi, un peu comme toi, je suis toujours assez nuancée! ;o)
@ Zed : Pour les campes et tout ça (j'y étais d'ailleurs en fin de semaine) ça ne me rend pas ma-la-de vraiment, parce que je ne m'attendais pas à autre chose, malgré qu'on avait négocié depuis des années avec ces grandes forestières pour protéger certains secteurs, on avait la parole et l'engagement de quelques-uns mais ils sont transférés ailleurs, l'entreprise a été fusionnée à une autre et ils n'ont rien respecté de nos ententes mais je connais tellement leurs façons de faire que plus rien ne m'étonne, plus rien, je te dis. Mais ça me fait toujours de la peine... Quant à ce truc devant chez moi (à la maison) Crocomickey a trouvé la solution facile (!) ce qui fait que l'envahissseur se trouve automatiquement à être temporaire mais le fait qu'on sache qu'il s'agit de la cabane à Ti-Blanc, un voisin, ça devient familier, tout à coup, on a beaucoup de tolérance!
@ Crocomickey : Ouais, c'est ça! Au pire, il nous reste quelques semaines à avoir ça dans la face...
@ Zed : À mesure que j'avance dans la vie, je m'aperçois qu'on a beau rester loin et payer le prix, on n'est jamais chez soi comme on le pense. Enfin, on y est jusqu'à ce qu'il se trouve quelque chose de payant alentour ou en-dessous. C'est ce qui nous arrive au campe, la forêt autour est payante une fois couchée et le sous-sol regorge de richesses. On a vu arriver la machinerie, ils font des chemins larges comme des autoroutes, des ponts, c'est déjà enclenché, ils ne reculent pas, ces gens-là. Ils savent ce qu'ils viennent exploiter et crois-moi, rien qu'à voir ce qu'ils investissent, ça va être payant, on ne fait pas le poids. C'est pareil partout. Ça doit être pire encore pour ceux qui se réveillent un bon matin avec de la machinerie sur leurs terres qui fait de l'exploration pour trouver du gaz de shiste. L'exploration, c'est dérangeant, imagine l'exploitation...
@ Jacks : C'est sûr que c'est plein de bon monde ici, j'arrête pas de m'en rendre compte. On discute entre amis, on amène des exemples, des arguments, des comparaisons, des visions de différentes régions, différentes réalités. Mais tu sais quoi? Roy Dupuis m'a beaucoup fait réfléchir dans l'entrevue qu'il donnait dernièrement à TLMEP au sujet du film « Cherchez le courant » (mettant en vedette La Romaine) dont il était venu faire la promotion pour qu'il soit vu le plus possible et ce, gratuitement, il était là au nom de la Fondation Rivières dont il est le porte-parole principal. Il disait que ça ne donnait rien de se débattre et d'être sensibilisé à tout ce qui se passe dans notre dos si on est toujours les mêmes 1000 personnes qui sont conscientes de ça. Il a raison, il mettait le doigt dessus, et c'est ce qui me dérange moi aussi, de prêcher à des convaincus, de crier dans le désert de l'indifférence générale, ça donne quoi en bout de ligne? Les jours où je suis fatiguée, c'est ce qui m'achale. Et puis, il vient un temps où l'on aime parler d'autres choses de plus réjouissant. Ce qu'on veut, comme personne, c'est d'être heureux, non? De temps en temps, on pète une coche quand on n'en peut plus, quand on se sent trop envahis, on dénonce, on démontre avec des faits, des preuves, on essaie de réveiller du monde. Moi, c'est l'indifférence du monde qui me rentre dedans le plus. Pas ceux qui se tiennent ici, les autres...
Tout à fait d'accord avec ton dernier commentaire mon amie... Quand t'entend quelqu'un te dire, "ben c'est tant mieux, une mine à ciel hiver ici, je vais faire un coup d'argent pis déménager ailleurs ensuite, y a rien là!"... Tu n'as pas envie de ressortir toute ta batterie d'argument ou de rajouter quelque chose, ça ne sert à rien... C'est désolant! Soisig
@ Soisig : T'as jamais si bien dit, ma chère, « une mine à ciel hiver », c'est de saison en toutes saisons par ici! Il y a les indifférents et aussi ceux qui en tirent des profits immédiats sans penser plus loin. Dans notre région, on a les deux. Je connais quelqu'un qui avait les mêmes idées que moi au sujet du peu de respect qu'ont les minières pour l'environnement et les populations locales. Là, lui et sa femme travaillent tous les deux pour Osisko, chacun au-dessus de 100 000 $ par année, c'est drôle, ils ne parlent plus de rien pantoute. En plus, ils se désâment à faire de l'overtime, on ne les voit plus nulle part... Ça ne m'étonnerait pas que dans quelques années, ils vendent tout ici et aillent rejoindre leurs enfants « dans l'sud » du Québec.
Je ne sais trop pourquoi mais enlisant la première partie j'étais content de te voir en colère. Peut-être que ça me prouvais que tu n'est pas que positive, tu es comme tout le monde, comme moi puis le voisin, le tien comme le mien. Mais la suite me prouve que tu n'es pas comme tout le monde. Les gens intègres comme ça, c'est assez rare. C'est enrichissant ce billet.
Merci d'être si franche et si proche de nous.
@ Maestro : Bon, toi aussi, t'aimes ça quand je pète ma coche! T'es pas le premier à me dire ça. On m'a souvent dit que je manquais d'agressivité. Mais je suis franche, ça, tout le monde en convient! Donc, ça prouve que j'arrive mieux à ce je souhaite sans avoir besoin d'être agressive. Ça demande de l'énergie de se choquer, t'sais!
En tout cas, ta visite ici ce soir me fait grand plaisir. Des envahisseurs comme toi, j'adore ça.
J'aurais cru que c'était mon billet le plus récent, Les vieux amis, qui t'aurait interpellé bien davantage. Il y avait un Daniel qui m'a fait penser à toi samedi soir dernier...
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