jeudi 12 août 2010

Le blogue de Malartic




Photo 1 : Sur le chemin du retour de ma fin de semaine « dans l'sud » du Québec, hier en fin d'après-midi, à l'entrée de la ville de Val-d'Or, là où la mine Sigma, opérée par Century Mining, signe cette cicatrice dans le paysage en guise de mot de bienvenue. J'essayais de me mettre dans la peau d'une touriste qui arrive en Abitibi...

Photo 2 : Quelques kilomètres plus loin, dans la ville de Malartic, ce petit parc pour enfants avoisine le « mur vert » de la compagnie minière Osisko qui est en train de se monter pour cacher « le trou » qui fera paraître celui de l'entrée de la ville de Val-d'Or comme minuscule. Allez, les enfants, on va jouer au parc, apportez vos masques ou arrêtez de respirer et n'oubliez pas vos bouchons pour vos zoreilles!

Photo 3 : Il y a ceux qui ont été expropriés mais il y a ceux qui n'ont pas eu cette « chance », la mine est dans leur cour, juste assez loin pour qu'on ne les déménage pas ailleurs... L'église est donc victime elle aussi des « blasts », des bruits et des poussières pas très « catholiques ». Mais il y en a beaucoup d'autres, des citoyens de Malartic qui ont la mine dans leur cour et qui doivent vivre avec une décision à laquelle ils n'ont jamais pris part. On ne leur a pas demandé leur avis.

Le blogue de Malartic

Ce billet, j'avais commencé par l'écrire sans l'illustrer d'aucune photo. J'en ai rapporté quelques-unes hier mais elles ne traduisent pas vraiment l'ampleur de ce qui se passe. Alors, je vous invite, si vous avez un peu de temps libre, à aller lire les derniers développements dans le domaine minier de notre région, sur le blogue de Malartic, en cliquant sur ce lien :

http://malartic.blogspot.com/

La maison de Ken Massé, le dernier résistant, a été démolie aujourd'hui. Les photos que vous voyez sur le site ne sont pas tirées du début du film Avatar mais de ce qui se passe réellement à Malartic, en direct ou à peu près, avec l'exploitation de la mine d'or à ciel ouvert de la compagnie Osisko.

Au même moment, un ami, un rassembleur, un homme d'exception, un amoureux fou de la région, Guy Lemire, nous a quittés dimanche après-midi, un arrêt cardiaque... Il était avec sa famille à son chalet, en train de construire une cabane en forêt pour ses petits-fils. Ça ne va pas très bien pour ma région...

Lisez surtout s'il-vous-plaît l'hommage que lui rend Margot Lemire dans l'article publié sur le blogue. Guy était un être formidable, de ceux qui construisent des ponts et des régions, un pays tout entier. Ses funérailles auront lieu demain.

Merci à deux blogueurs qui ont parlé de cette affaire, Zed et Gaétan. Sans le savoir, ils ont pris la relève, alors que j'étais sans mot.

11 commentaires:

Anonyme a dit…

Je viens de retourner sur ce très actif blogue. Très touchant le témoignage, en effet. J'aime la conclusion... ne pas gaspiller un si bel héritage.

La lettre de Ken Massé. Faut s'arranger pour que tout ceci reste en mémoire.

Zed

Zoreilles a dit…

@ Zed : Ça me touche beaucoup que tu aies lu l'hommage à Guy, écrit par Margot, deux personnes de grande qualité. Il y a encore du bon monde dans le monde, tu sais, quand on en perd un, on trouve ça difficile mais il en reste d'autres, des Ken Massé, des Guy Lemire, faut seulement qu'on les aide à sortir de l'ombre, qu'on les amène sous le feu des projecteurs un peu.

Ce sont des semeurs d'espoir.

Guy Vandal a dit…

Ç'est le genre de blogue qui donne de l'espoir, au moins, des citoyens prennent la parole.

Ils vont peut-être finir par devenir des exemples.

Je ne le connaissais pas. Merci.

Anonyme a dit…

Ce projet de mine d'or est très particulier, un drame pour les uns, une job pour d'autres, une occasion pour d'autres encore. L'affaire divise probablement pas mal de gens, plus qu'il n'y parait j'en suis certain.

Le tout se déroule comme dans un roman de Zola. Cette entrepise est un rouleau compresseur, une bête humaine, appuyée par les notables, les gens d'affaire, les politiciens.

Il m'arrive de croire qu'un combat sans violence est impossible. Le combat est innégal, on accepte la défaite ou on sacrifie sa vie, enfin, quelque chose comme ça. Cela en vaut-il la chandelle? C'est probablement ce que chacun s'est demandé.

Pourtant il reste d'autres individus dont le travail est de rapporter ces événements au reste de la population. Ici, loin de cette région mais près des centres de décisions, on en parle peu, on entend peu de choses.

C'est à se demander ce que sont devenus les communicateurs, ce ne sont pourtant pas les outils qui manquent.

Accent Grave

Soisig a dit…

Un bel hommage bien mérité de la part de Margot Lemire. Tous les gens se préoccupant de la région le connnaissaient et savaient qu'ils pouvaient compter sur lui pour valoriser et défendre nos intérêts. Un autre grand qui nous est enlevé...

Zoreilles a dit…

@ Guy : Le blogue de Malartic, c'est le genre de prises de parole et d'actions citoyennes qui ne pourraient jamais se mettre sur pied ni se concerter si nous n'étions pas à l'ère des blogues, du web 2.0. Je me doutais bien que tu aimerais cette idée. Merci d'avoir lu au sujet de Guy (Lemire), ça me touche beaucoup.

@ Accent Grave : Vous saisissez bien les enjeux et les conséquences. Effectivement, cette affaire pave la voie (un pont d'or?...) à tout ce qui va suivre et elle divise terriblement les gens d'ici, pas seulement ceux de Malartic, vous pouvez me croire. Je sais qu'on n'en entend peu parler ailleurs, vous me le confirmez, et même ici, c'est sous un angle très précis, très pro Osisko, qu'on nous livre parfois des petits reportages. Voilà pourquoi ce sont des citoyens qui doivent jouer les communicateurs, outillés ou pas. Où sont-ils tous, ceux dont c'est le travail, de nous informer? Je ne sais pas, en tout cas, la minière a recruté les plus efficaces, les plus chevronnés, les meilleurs d'entre eux, de fins stratèges qui pourraient vendre des frigidaires à des Inuits. Et je sais de quoi je parle, je les vois à l'oeuvre depuis trois ans, les communications, c'est mon métier.

@ Soisig : Tu peux bien mesurer, comme moi, tout ce que nous avons perdu, comme région, avec le décès de Guy Lemire. Pour sa femme, Lucie, ses enfants, ses petits-enfants, c'est une peine sans nom, un vide qui fait mal. Ses funérailles ont été à son image, vendredi dernier, j'aimais mieux ne pas y être, j'étais sur la route, mais on m'a tout raconté. Des hommages drôles et émouvants, sentis, chaleureux, pleins de tendresse. Isabelle a chanté « Le coeur est un oiseau » à la demande de la famille, cette chanson de Richard Desjardins, qu'on n'avait pas réussi à rejoindre. Je garde précieusement dans mon coeur des moments précieux vécus en sa compagnie, d'ailleurs, tous les moments avec lui étaient uniques. Je pense à son concept de « gestion par la tendresse », cette discussion au garage en attendant nos voitures en réparation, notre amour de la région, cette rencontre par hasard à Havre-aux-Maisons, les effusions de joie, là j'arrête, parce que je vais me mettre à pleurer!

Zoreilles a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Anonyme a dit…

Photo 3 : si je comprends bien, le musée et ses œuvres percutantes, c'est dans le trou!

Zed

Zoreilles a dit…

@ Zed : Tu as un oeil de lynx, ma chère Zed! Ce musée annoncé sur l'affiche, c'est le Musée minéralogique de Malartic, communément appelé ici le « Musée des mines » qui existe depuis au moins 25 ans. Ce qui est cynique et troublant dans cette affaire, c'est que maintenant, à ce musée, (bienvenue aux touristes!...) on peut sentir les tremblements de terre des « blasts » (explosions), respirer la poussière à plein poumons et entendre les bruits assourdissants des machines à temps plein. Ça ne peut pas être plus « live » que ça!

Le plus triste, c'est que des résidents de Malartic, ceux qui n'ont pas été déménagés par Osisko, de gré ou de force, parce qu'ils sont situés à quelques pieds du trou, ceux-là vivent carrément collés sur l'exploitation minière. J'exagère même pas quand je dis que le trou est dans leur cour. J'ai photographié l'église et le parc pour donner une idée, parce que je ne voulais pas créer de malaise (ni me créer des ennuis) en montrant la maison d'un individu en particulier.

Si tu voyais ce parc pour enfants, avec ses balançoires colorées, ces modules invitants, ces caroussels... qui donnent sur l'enfer bruyant, gigantesque, sombre et froid à quelques mètres, ça donne le frisson.

Si j'avais pas de coeur, je pourrais même trouver ça drôle, comme l'affiche du musée qui mène direct dans le trou.

Anonyme a dit…

J'ai cliqué sur la photo encore pour voir l'affiche et c'est vrai que le musée est quasiment dans le trou. Et les résidents qui sont juste à côté, leur maison que vaut-elle maintenant, sans parler de leur santé (physique et mentale)à vivre dans un tel environnement...

Les minières toutes-puissantes auront toujours le dernier mot, grâce à l'appui de nos gouvernements, et c'est pareil partout, dans toutes les régions. Frustrant, enrageant de faire non seulement voler les richesses naturelles, laissant la dévastation ensuite, mais n'avoir aucun souci de la vie détruite des gens qui y vivent, c'est criminel. Un crime qui ne sera jamais reconnu comme tel. J'imagine le PM national rigolant en lisant ce commentaire naĩf; il n'a pas un gigantesque trou de mine dans sa cour lui.

Et hier je lisais que l'exploitation de l'uranium à Sept-Iles, ça va se faire, malgré l'opposition des médecins de l'endroit et des citoyens. L'argent ça parle plus fort que la colère des opposants. Accent a raison: un combat sans violence c'est impossible!

Zoreilles a dit…

@ Lise : Tu dis tellement vrai. Je viens de lire quelque chose sur le site web de Radio-Canada en Abitibi-Témiscamingue, une nouvelle qui est beaucoup passée sous silence dans les autres médias. Visiblement, ça n'intéresse personne et ça laisse toute la marge de manoeuvre possible au gouvernement, aux minières, et cet article, comme ton commentaire, illustre parfaitement ce qui se dessine dans les années à venir.

L'uranium au Québec