lundi 12 février 2007

L'être le plus extraordinaire que j'ai connu

« Les vrais héros ne meurent jamais...

Il a beau être le plus grand communicateur que je connaisse, il est pourtant un homme de peu de mots. Son intelligence vive et les petites lumières bleues de son visage, toujours illuminées de ses sourires généreux, suffisent amplement à exprimer les amours, les tendresses et les bontés présentes au coeur de cet homme que j'aime. Son coeur? Grand comme le monde! Le monde? Il l'aime tellement et on le lui rend parfaitement.

Son bel accent madelinot lui a toujours servi de passeport international, qu'il dit. La simplicité, la poésie et la pureté de son langage coloré, assaisonné de termes marins, contribuent aussi à faire de lui un être unique, tendre, drôle et attachant. Même qu'il invente souvent des mots qui veulent tout dire, comme lorsqu'il parle de « l'heureusité »... Il faut reconnaître qu'il maîtrise l'art de vivre et d'aimer comme pas un, tel un véritable champion de l'heureusité, ce concept bien à lui qu'il a su parfaire, transmettre et propager dans sa vie amoureuse, familiale, sociale et spirituelle.

Il s'est tellement battu pour sa propre vie! Non pas qu'il avait peur de la mort, bien au contraire, mais il aimait tant la Vie elle-même et si je ne suis plus une petite fille depuis des lunes, Papa reste toujours mon héros, il le sait bien et ça le fait toujours sourire. Encore bien plus que de m'avoir donné la vie, il me l'a fait aimer, si bien que grâce à lui et à son heureusité, je commence à comprendre que les vrais héros ne meurent jamais tout à fait. »

Ce texte, je l'ai écrit et lu en guise d'hommage lors des funérailles de mon héros et je l'ai fait en souriant, je lui devais bien au moins ça. Dans cette église Notre-Dame de Protection qui lui était si chère, c'était paqueté de monde debout jusque sur le perron, comme à la messe de minuit. Un rassembleur... Ça fait aujourd'hui 2 ans, en ce 12 février, que mon héros s'est éteint et j'étais là à lui tenir la main jusqu'à son dernier souffle mais j'aurais pu dormir aussi, je l'avais tellement vu vivre que je ne ressentais pas le besoin de le voir mourir. Pourtant, à cet instant, j'ai eu comme une révélation que notre relation venait de se transformer, la certitude que si son coeur venait de cesser de battre, l'amour qu'il avait donné continuerait toujours de vivre.

Je crois qu'on peut aimer si fort qu'on peut survivre même à la mort, bien au-delà des frontières du temps et de l'espace qui nous sont connus. C'est ce qui s'est produit entre Papa et moi. Cette photo de lui n'est peut-être pas la plus jolie mais sûrement la plus représentative. Avec Maman, il aimait tant voyager, découvrir des paysages, des chemins, des univers et surtout des gens. Puis, il était si amoureux d'elle qu'il en devenait touchant, très inspirant pour l'adolescente et la femme que je devenais.

Il a fait avec passion tous les métiers, de bûcheron à mineur, en passant par la vente d'idées, de services et de produits de toutes sortes mais c'est tout de même dans sa propre entreprise, à gérer son monde et ses contrats, qu'il a été le plus heureux, professionnellement j'entends, parce que pour tout le reste, l'heureusité faisait partie de sa nature, comme ses ses yeux si bleus, son sourire irrésistible, son charisme et son âme d'enfant.

Il a été le premier homme de ma vie, grâce à qui toutes mes relations avec les autres hommes, amoureux, frères, amis, collègues, collaborateurs, ont toujours été basées sur des complicités instantanées et des rapports égaux, empreints de respect, de chaleur, de vérité et d'admiration. Quand on a eu cette chance, on ne peut que sourire à la Vie!

Lorsque je pense à Papa maintenant, il me vient à l'esprit des images drôles et tendres, comme quand il me donnait sa première tranche de pomme avec un clin d'oeil, quand il s'émerveillait de la moindre chose que j'avais su créer ou découvrir, quand il me fabriquait des échasses avec les 2 par 4 restants d'une construction quelconque et qu'il en fabriquait ensuite pour tous mes amis de la rue Rupert, quand il voulait tout savoir de mes idées ou de mes projets et qu'il me disait « viens t'asseoir pis conte-moi ça! », quand j'avais une blessure au corps ou à l'âme que je n'arrivais pas à lui cacher et qu'il me racontait de sa belle voix grave sa légende du cheval blanc, qui court dans la prairie, fort et libre comme le vent et qui ne pense qu'à l'heureusité...

Il est vraiment l'être le plus extraordinaire que j'ai connu et je sais qu'il m'accompagne toujours dans mes silences.

11 commentaires:

André Bérard a dit…

Quel bel hommage! Pouvoir écrire ces mots, aujourd'hui, est tout aussi important que l'ont été les moments qui les ont inspirés.

Anonyme a dit…

Zoreilles,

Comme tu sais, ma mère est décédée en octobre.

Maintenant mon père est seul. C'est aussi, pour moi, une sorte de héro, je me souviens l'avoir écrit dans un billet sur ExLibrex.

Tes mots sont bons autant que beaux.

Merci.

Anonyme a dit…

merci d'avoir mis les mots sur ma journée
yaya

Anonyme a dit…

Ton texte est très touchant. Tu es très chanceuse d'avoir eu une relation aussi riche et épanouie avec ton père. C'est précieux lorsque ça se passe, et ça laisse un héritage d'une valeur inestimable.

Zoreilles a dit…

Merci à vous tous qui avez compris ma chance. N'ayez crainte, j'en suis consciente.

@ Esperanza : Je suis allée « fouiller » au pif dans tes archives pour trouver, fin septembre, cet hommage à ton géant. J'y ai lu aussi tes réflexions lors des derniers jours de ta Maman et un peu après. C'est à mon tour de te dire merci.

@ Yaya : Je savais même pas que tu me lisais des fois et ça faisait si longtemps que j'avais pas entendu « Yaya ». Non mais, quelle signature! Tout dire en peu de mots... Tu tiens ça de Papa, toi, c'est sûr! Je me demande bien quelles images te viennent, à toi, quand tu penses à lui maintenant. Je nous souhaite d'en reparler.

Anne-Marie a dit…

WOW!...
J'ai des frissons...
Comme je m'ennuie de ton frère, je parcourais ton blogue et je tombe sur un billet où tu parles de ton papa... Que c'est beau ce texte et cet amour pour ton père! Tu as raison, ce devait être un homme exceptionnel!

Zoreilles a dit…

@ Anne-Marie : Tu vois, quand on dit à Yves qu'il ressemble à Papa, c'est tout un compliment, hein?

Dans ce texte, que j'ai relu parce que tu venais de le commenter, j'ai comme reconnu Yves, on dirait. Pas toi?

C'était mes débuts sur mon blogue, un texte que je portais en moi depuis longtemps... et que je resignerais n'importe quand avec la même émotion, la même reconnaissance de cette chance énorme que nous avons eue, tous les trois, de l'avoir pour Papa.

Merci de ton commentaire qui me fait chaud au coeur.

Anne-Marie a dit…

Rebonjour Francine!

Je viens de regarder à nouveau la photo de ton père... et l'ai remercié d'avoir placé son fils sur ma route!

...et je lui ai fait toute une promesse!!!

Zoreilles a dit…

Anne-Marie,

Je suis sûre d'une chose... c'est que tu tiens toujours tes promesses!

Je « ressens » le sourire de Papa... et son heureusité. Il t'aurait adorée lui aussi.

xxxxx

Anne-Marie a dit…

Mais quel compliment...
Merci...vraiment très sincèrement!
Ça veut dire beaucoup pour moi ce que tu as écris là.
Et, oui, effectivement, je tiens toujours mes promesses! Alors je pèse mes mots! ;0)

Zoreilles a dit…

Anne-Marie,

J'en étais sûre, mon petit doigt me l'avait dit!

;o)