jeudi 8 février 2007

À contre-courant



Juillet 2006, Mont Tremblant.

Une fois de retour de nos quelques jours de vacances « dans l'sud », j'ai souri en voyant plein écran sur mon ordinateur les nombreuses photos prises lors de ce séjour. Parfois, elles me rappelaient les bons moments vécus lors de ce petit voyage, comme lors des retrouvailles familiales à Bellefeuille (maintenant St-Jérôme) mais parfois aussi, comme avec celle-ci, parce qu'un détail qui m'avait échappé au moment de la photo me sautait aux yeux d'une manière saisissante. Attendez que je vous raconte.

Non mais, c'est vrai, ça fait du bien des fois de sortir de notre univers un peu. Autant j'aime le calme de nos forêts, nos lacs et nos rivières, autant j'ai besoin de temps en temps d'aller me perdre au milieu de la foule quelque part où il y a affluence, surabondance et ... comment dire... trop de... tout, finalement!

Donc, avec une journée d'avance sur la date de la rencontre familiale, et puisqu'on était dans le secteur, nous avons décidé, Gilles et moi, qu'on pourrait bien aller à Mont Tremblant! D'ailleurs, on nous annonçait de l'orage, alors, il y aurait sur place tout ce qu'il faut pour s'abriter, et puis, des belles terrasses où prendre un apéro, un gueuleton, du monde à voir, des choses à faire...

Déjà, dans l'immense stationnement de ce « village » créé artificiellement, il lui a fallu me rappeler à l'ordre et insister beaucoup parce que j'avais repéré des belles framboises bien dodues et bien mûres dans un boisé oublié et ce, juste à côté d'où on avait stationné la voiture! J'aimais déjà l'endroit. Ensuite, en arrivant dans les installations d'Intra West par cette chaleur humide, accablante même, dans cette abondance de tape-à-l'oeil, de couleurs, d'odeurs, de boutiques, de vitrines, de ces milliers de personnes qui parlaient trop vite, trop fort, trop de langues mélangées, on passait notre temps à se dire sans paroles mais avec nos regards : « Mais qu'est-ce qu'on fait ici? » lorsqu'on a repéré tous les deux en même temps le téléphérique où l'on allait pouvoir monter plus haut, avoir une vue d'ensemble sur toute l'affaire et reprendre notre souffle! Dans ces moments-là, quand on ne se sent pas à notre place et qu'il nous semble que ça paraît trop, il me fait crouler de rire parce qu'il fait son « Crocodile Dundee ». Et ce jour-là, croyez-moi, il s'est surpassé, il n'avait aucune difficulté à entrer dans la peau du personnage!

Donc, on monte, on monte, on monte et moi, je ris, je ris, je ris, parce que plus on monte, plus on voit trop de couleurs, de boutiques tape-à-l'oeil, de terrasses bondées, de vitrines accrocheuses, de monde qui parlent trop vite, trop fort, de piscines vides (sont-elles vraies?...) et moins on se sent à notre place. « On n'a pas rap » mais là, pas pantoute. À un moment donné, presque rendus au sommet, on aperçoit un peu de forêt et mon Crocodile Dundee y cherche désespérément un animal, n'importe lequel, un castor, un mulot, une perdrix ou comme il dit « une tite cabane tout croche » un marais desséché, quelque chose de pas parfaitement aménagé et il commence à se sentir à l'étroit pas à peu près dans cet habitacle fermé qui nous amène directement dans les nuages noirs.

Enfin, on débarque au sommet. Tout le monde se dirige en nous poussant vers le belvédère mais pourquoi? Nous ne sommes plus capables de suivre le troupeau et nous allons plutôt du côté où ce n'est pas encore aménagé. Il n'y a rien à voir là, apparemment, mais nous sommes seuls... Enfin, de la forêt et des montagnes, avec rien dessus. Un petit respir. C'est tellement beau le Mont Tremblant!

Il nous a bien fallu redescendre à un moment donné, débarquer au milieu de ce cirque tout parfait. On aurait voulu s'asseoir quelque part, commander quelque chose mais les terrasses étaient pleines partout, c'est ça, les vacances de la construction. C'est là que j'ai voulu prendre une photo souvenir mais je ne réalisais pas à ce moment-là que mon Crocodile Dundee, c'est le seul qui marche à contre-courant parmi tout ce monde mais il semble aller à la même vitesse que les autres, par exemple. Avec son T-shirt jaune et ses jeans, c'est lui qui marche d'un pas décidé comme quelqu'un qui se sauve de quelque chose!

Des fois, je me dis qu'on n'est vraiment pas sortables!

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Cela fait tellement longtemps que Sainte-Adèle et le Mont-Tremblant sont devenus des inconnus pour moi. Je me souviens du haut le coeur que j'avais en voyant ces montagnes tranchées et les tout-débuts d'un « a »-ménagement. oh-combien-déraisonnables, pour rester dans le vif d'un autre hu-hum... sujet.

J'y ai cueilli des framboises, pleines de poussières de la route, mais si délicieuses. Entendu des huards, exploré des petits bouts de forêts, qui me semblaient des univers, respiré à pleins poumons de l'oxygène, sans voir personne autour. J'ai patiné près d'une minuscule église. à Sainte-Adèle, tournant en rond sur une patinoire pas assez grande pour faire des longueurs...

Je ne crois pas que je pourrais y retourner. Je crois que j'aurais trop mal. Que je serais trop révoltée, trop blessée.

Je regarde la photo. C'est cela, Sainte-Adèle-Walt-Disney, maintenant??? Si c'est cela, quelle tristesse.

Zed :|

Anonyme a dit…

J'ai bien ri en lisant ton texte ce matin. Je m'imaginais Gilles en Crocodile Dundee, avec son chapeau, marchant à contre-courant dans la superficialité de Mont-Tremblant... C'est une belle image !

Anonyme a dit…

Et dire que certains touristes d'outre-mer qui iront à Mont-Tremblant diront "Eh que c'est beau le Québec"...

Ça fait longtemps que je ne suis pas allé à cet endroit... C'était bien avant que ça devienne Intra-West City.

Le $$$ fait des ravages dans ces lieux touristiques. Les Laurentides (région) sont appelées à devenir un ramassis de villes de carton-pâte qui ne reflèteront plus jamais l'histoire et la beauté crue des magnifiques paysages qui y trônaient.

C'est pour ça qu'il faut absolument préserver la nature des lieux non-déformés par l'humain...

Zoreilles a dit…

@ Zed : Oh oui, ma chère, tu devrais y retourner, si je peux me permettre ce conseil! Il te suffirait d'éviter le faux Mont Tremblant d'Intra West, et de redécouvrir l'autre, le vrai Mont Tremblant qui s'appelait autrefois Sainte-Jovite, qui reste magnifique et plein de charmes, les gens y sont accueillants et chaleureux. Et Sainte-Adèle, c'est autre chose complètement aussi, il faut encourager le tourisme dans ces beaux villages où l'on sait préserver la vraie nature des lieux et des gens! N'oublions pas qu'acheter, c'est voter et quand on est hébergé dans un Bed & Breakfast ou qu'on prend un succulent repas sur une terrasse d'un de ces authentiques villages, on encourage une forme respectueuse de développement touristique... à échelle humaine!

@ Henri : Ben oui, mon cher, tu devais te bidonner, toi en plus, tu connais le personnage!

@ Esperanza : Je demeure quand même optimiste que la région des Laurentides, comme d'autres, saura préserver ses beautés naturelles, ses paysages à couper le souffle et résister à des développements sauvages comme ceux qui sont mis de l'avant par des multinationales. Et nous, comme touristes et consommateurs, nous avons le devoir d'encourager ceux et celles qui ont une vision, une idéologie axée sur le « développement durable », un terme trop souvent galvaudé.

Et pour notre part, nous n'avons pas dépensé de sous chez Intra West, excepté ce qu'il nous en a coûté pour aller dans le téléphérique, histoire de prendre une bouffée d'oxygène en haut de la montagne, pour ne pas virer fou! Autrement, on aurait eu l'impression d'encourager une sorte de Wal-Mart touristique! Par contre, après l'orage, nous avons dépensé et passé du vrai bon temps dans une charmante auberge et soupé en amoureux sur une terrasse de... Mont Tremblant centre-ville, autrefois Sainte-Jovite!

À mon avis, quelqu'un qui va passer une journée chez Intra West City n'a absolument rien vu du Québec... Est-ce qu'on a vu la France parce qu'on a visité chez Euro Disney?