lundi 5 mai 2008

Journée internationale contre l'homophobie

Photo prise en juillet dernier à Wakefield, dans la région de l'Outaouais. J'ai choisi cette photo pour illustrer mon billet parce que je crois toujours qu'il vaut mieux bâtir des ponts qu'ériger des clôtures...

Le 17 mai prochain sera la « Journée internationale contre l'homophobie ». L'initiative de ma blogueuse amie, Zed, dont vous trouverez le lien dans ma liste des carnetiers libres, propose qu'on écrive un billet personnel sur le sujet. Par solidarité et par conviction, je tenais à faire ma part, dans la mesure de mes petits moyens. J'aime l'action concertée, la solidarité entre les êtres humains, les simples gestes de bonne volonté qui proposent dans la non violence des avenues qui viendraient enrichir notre société.

Mais ici, vous le savez, je ne sais pas écrire autrement que d'un point de vue intime et personnel et l'essence de mon blogue est typiquement Abitibi-Témiscamingue. C'est comme ça. Alors, j'ai choisi de m'impliquer sous un angle particulier pour rejoindre l'universel, dans la perspective peu souvent abordée de « vivre son homosexualité en région ».

J'ai cherché dans mes expériences personnelles ce que je pouvais connaître du sujet. Malheureusement très peu. Un souvenir douloureux s'impose dans mon esprit et vient prendre toute la place. Une belle journée de juillet, il y a quelques années, j'ai été traumatisée d'entendre, au retour des vacances, les nouvelles de ma région. Je voulais reprendre contact tranquillement avec chez nous à travers les médias radiophoniques : « À Val-d'Or... trouvé mort chez lui, dans son appartement de la rue... gisant dans son sang... une affaire de moeurs... la police recherche toujours le suspect important dans cette affaire... on connaît maintenant l'identité de la victime... » Puis, son nom. LE MÊME QUE MOI. Une description de la scène que je veux oublier.

Le p'tit frère de Papa... Lui qui n'aurait jamais fait mal à une mouche. Une bonté naturelle, probablement même un peu naïf, quand j'y repense. Sympathique, enjoué, d'un naturel heureux et sensible, aimant les gens et la vie. Ah oui, tellement. Nous avons toujours su et n'en avons jamais fait une histoire mais il aimait les hommes. Il aimait la mer aussi. Et puis la vie de chalet, la musique de mononk, ses frères, soeurs, neveux, nièces, les restaurants, faire la cuisine et surtout sa fille, Nathalie, son plus grand amour. Il me semble qu'il n'a jamais souffert de l'homophobie, de vivre dans notre région la vie qui était la sienne. En suis-je bien certaine? À la réflexion, peut-être pas. Peut-être qu'il s'était marié et qu'il avait fait un enfant pour échapper à l'homophobie? Quoiqu'il en soit, il n'avait jamais considéré comme une erreur ce mariage qui n'avait pas duré puisque Nathalie en était issue.

Est-ce qu'il a été assassiné aussi lâchement parce qu'il aimait les hommes? Non. L'homme qui l'a tué aussi violemment avait abusé de lui et de sa bonté bien avant ce jour-là. Une histoire d'amour, de dépendance affective, d'abus, mais pas un meurtre homophobe. Quand nos médias parlaient de cette affaire, qui d'ailleurs les a émoustillés bien trop longtemps, ils disaient toujours que c'était « une affaire de moeurs ». Et ça me frustrait chaque fois.

Je suppose que non mais je ne saurai jamais s'il a souffert du regard et de l'attitude des autres de son vivant mais je sais qu'il en a été victime après sa mort. À ses funérailles, j'ai vu ma cousine Nathalie pour la dernière fois. Elle vit son homosexualité dans une grande ville et ne remettra plus jamais les pieds ici. L'Abitibi-Témiscamingue, pour elle, qui y a grandi, c'est la région qui a tué son père.

Est-ce que j'ai vécu l'homophobie, moi, pour pouvoir en parler? Oui, une fois. En 2005. Je produisais et travaillais à la rédaction d'un magazine annuel régional de santé publique. Distribué gratuitement dans la population d'ici en 20 000 exemplaires, j'étais consciente que je pouvais y passer de l'information et des messages que je trouvais importants. C'était plein de balises et de paramètres très sérieux, bien sûr, mais j'avais confiance que je pouvais naviguer à travers ça.

J'ai écrit tous les articles en tâchant de vulgariser l'information scientifique et/ou médicale, les données régionales, en insistant sur les bienfaits d'une saine alimentation, de l'activité physique, en présentant aussi les organismes communautaires, les ressources d'aide, etc., en suivant les axes établis par le Ministère. Chaque virgule, chaque mot, chaque phrase et même les illustrations devaient être approuvées par la direction qui m'avait donné ce mandat. Dans un article intitulé « Conjuguer sa vie au présent (les jeunes de 15 à 30 ans) », j'abordais la question de notre taux de suicide très élevé, des actions possibles pouvant prévenir la détresse, des partenariats avec les organismes dédiés à la jeunesse, en milieu urbain comme en milieu rural.

Très rapidement, dans cette page qui s'adressait aux 15-30 ans, j'en suis venue à présenter, et c'était mon objectif, la Coalition d'aide aux lesbiennes, gais et bisexuel-les de l'Abitibi-Témiscamingue, http://www.coalitionat.qc.ca/ qui avait pour mission de créer un environnement favorable à l'épanouissement des personnes, à leur santé et leur mieux-être, favoriser l'adaptation des services de santé et services sociaux, briser l'isolement, mettre en place des actions pour réduire l'homophobie au sein de la population, intervenir comme mobilisateur et porte-parole. J'étais fière de cet article-là qui mettait en lumière tout ce qu'on prônait dans cet exemple d'une réalisation issue des gens eux-mêmes, en réponse à un besoin criant de bâtir des ponts. Ainsi, on favorisait un rapprochement essentiel entre les jeunes et la société qu'ils sont en train de nous construire.

L'article se terminait ainsi : « Dans toutes nos interventions, nous devons investir temps, énergie, volonté et ressources, en gardant à l'esprit que ces jeunes portent en eux aujourd'hui, dans leur présent, les promesses, la richesse et l'essence de tout notre avenir en même temps que le leur ».

L'article n'a jamais été sérieusement considéré, revu, corrigé, discuté. Non. L'article a sauté au complet sans plus d'explication et n'a jamais été publié. Je l'ai pris vraiment personnel. J'ai dû rédiger autre chose qui s'adressait aux 15-30 ans, et si je me souviens bien, on leur a encore parlé des ITSS (infections transmissibles sexuellement et par le sang). Ce jour-là, c'est comme si j'avais été victime d'homophobie. Je sais, ce n'est rien comparé à ce que doivent vivre d'autres personnes...

En terminant, je voudrais exprimer une opinion toute personnelle en rapport avec l'orientation sexuelle des personnes. Je rêve du jour qui n'arrivera jamais où l'on n'identifiera plus les gens autrement que par leur prénom ou leur nom de famille. Qu'est-ce qu'ils font comme travail? Quelle est la couleur de leurs cheveux ou de leur peau? Quelle est leur orientation sexuelle? On s'en fout, ce n'est là qu'une partie de leur vie. Pas une définition de ce qu'ils sont. Mon oncle, à qui je dédie ce texte, n'était pas qu'un homosexuel. Il était beaucoup plus que ça. Il s'appelait Gérald, il aimait la vie et les gens mais son plus grand amour, c'était sa fille Nathalie et je sais qu'il a été un père très aimant, il ne pouvait en être autrement, c'était le p'tit frère de Papa. C'était ça, sa « marque de commerce », s'il faut absolument lui en donner une.

30 commentaires:

En direct des îles a dit…

Oui Zoreilles, quand donc serons-nous un prénom, un sourire?
Ton texte m'a beaucoup touchée, que de blessures graves peut causer l'ignorance, quel mal que l'intolérance!
Pourquoi l'être humain ne supporte-t-il parfois pas la différence, alors que tous, nous sommes uniques?

Anonyme a dit…

Chère Zoreilles,

comme je suis heureuse que ton blogue accepte les commentaires anonymes, car depuis samedi, après avoir fait une fausse manoeuvre, afin de changer mon profil blogger, je n'ai plus accès à mon compte.

J'ai lu plusieurs fois ton texte, et comme toujours c'est ton coeur qui parle, avec la générosité qui le caractérise, et c'est ce qui fait que tes lecteurs /lectrices soient aussi attachés /ées à la personne que tu es.

Je suis certaine que ton oncle était un homme extraordinaire, pour ceux qui l'aimaient, et c'est ce qui importe.

Comme toi, je déteste les étiquettes de valeur attachées aux gens, selon leur travail, leur statut ( marital ou non ), social ( Combien d'argent tu gagnes ? Où autrement dit quelle est ta valeur monétaire ? ), leur pouvoir, leur orientation sexuelle, ou leur convictions personnelles.

Il y a des gens que j'aime dans ma famille qui ont quitté leur région de crainte d'être jugés : un cousin que j'aime énormément, et une tante qui vit chez nos voisins du sud depuis des décennies.

Crois-tu Zoreilles que les gens seront reconnus un jour selon leurs qualités de coeur, leur générosité, leur gentillesse, ce qu'ils apportent aux autres sans rien demander en retour, et sans étiquette ? J'en doute ! Il faudrait bien des gens qui te ressemblent avant que le phénomène se produise!

Mille excuse pour le long commentaire, il fallait que ça sorte !!!

Zoreilles a dit…

@ En direct des îles : Nous sommes uniques et différents, c'est pour ça qu'on apprend tellement les uns des autres. Avec certaines personnes, on développe des affinités, on se trouve des points communs, on découvre qu'on a des valeurs qui sont semblables mais bien souvent, c'est dans nos différences autant que dans nos similitudes qu'on tisse des liens si forts.

@ Lise : Oh, j'ai bien peur qu'on rêve en couleurs, ma chère Lise, ce jour n'arrivera jamais. J'ignore pourquoi mais il semblerait que la peur de l'inconnu ou une insécurité maladive amène notre société à diviser le monde en catégories, en statuts, en petits compartiments de n'importe quoi. C'est ce que j'appelle « ériger des clôtures ». Pourtant, c'est si beau un pont, ça rapproche deux rives, deux univers. Et ça surplombe une rivière...

Solange a dit…

C'est pas demain la veille qu'on changera le monde. On connait tous quelqu'un dans notre famille où nos connaissances qui à souffert à cause de son orientation sexuelle. C'est plus facile de passer inaperçu dans une grande ville. C'est un très beau texte, qui fait réfléchir. Comme toujours tu as le don de nous faire vivre tes émotions.

Rosette ou Rosie, c'est pareil a dit…

Ma très chère amie Zoreilles,

Comme il est difficile de comprendre la bêtise humaine ! Ton billet est des plus émouvants et je suis convaincue que ton oncle était un homme remarquablemetn sympathique... Quelle tristesse et quelle injustice, bon sang ! Quand apprendrons-nous à aimer notre prochain plutôt qu'à s'entretuer pour des raisons qui n'en sont pas ? Les préjugés et la haine n'ont pas leur place dans nos coeurs et comme l'a si bien dit Angela Davis : Les murs renversés deviennent des ponts...
Je t'embrasse bien fort, Zoreilles ! :-)
P.S. : En passant, va voir mon blogue sur lequel j'ai affiché deux clips qui veulent également tout dire...

Anonyme a dit…

Un billet d'une éloquence terrible. Toute la sensibilité que tu y a mise en redouble la portée.

Tu sais Zoreilles, la non acceptatioon de la différence (n'importe quelle)est la cause de bien des conflits, bien des guerres... Certaines personnes qui vivent de telles situations personnelles de rejet et d'incompréhension meurent au dedans d'elles-mêmes. C'est vraiment dur à prendre.

J'ai aussi peu d'espoir que les choses vont vraiment changer un jour... À tout le moins faut-il, dans notre propre quotidien, continuer à poser des gestes concrets, continuer à voir la personne et non toutes les étiquettes qui lui sont accolées...

Parfois, je me demande si les choses changent pour le mieux ou si les gens n'auraient pas eu avantage à "faire semblant", comme dans les années 20-30-40... Je ne sais pas. Je ne sais pas si des événements comme le défilé de la fierté, la journée internationale contre l'homophobie etc, sont salutataires ou si, au contraire, ces manifestations ne servent qu'à renforcer les préjugés de ceux qui en ont...
Parfois, j'en viens là dans mes réflexions.

bibconfidences a dit…

D'abord, tes photos de l'autre billet sont très belles...Les îles de la Madeleine me tentent tellement...tu m'en diras des nouvelles..
Pour ce qui est de l'homophobie je dois dire que depuis que j'ai eu mon premier fils je n'ai plus fait de blagues homophobes devant lui et par le fait même ni ailleurs dans ma vie.
Cela dure depuis 24 ans.
Je me suis toujours dit que si mes enfants étaient homosexuels je ne voudrais à aucun prix qu'ils sentent le moindre recul de ma part vis à vis leur situation. Jamais dans ma maison il n'y a eu de discours homophobe non plus, au contraire, que des discussions et des arguments dénonçant la ségrégation fait entre êtres humains.
Je n'accepte pas non plus les blagues des autres depuis longtemps déjà et je ne me gêne pas pour leur dire mon opinion. Je rêve moi aussi d'un jour où nous serons intéressés par la personne plutôt que par son pedigree social.
C'est drôle, la question sempiternelle : " Que fais-tu dans la vie ? " en référence au travail m'a toujours dérangée... Je réponds rarement que je suis enseignante...je parle plutôt de ce que j'aime dans la vie et je demande la même chose aux autres...À toi je ne le demande pas parce que ton blog me permet de te connaître et surtout, de t'apprécier...

Zoreilles a dit…

@ Solange : Tellement de gens des régions se sentent obligés d'aller habiter une grande ville, pour pouvoir assumer qui ils sont. Ici, à Rouyn-Noranda, on a un bar gai. Si tu savais le nombre de gars et de filles qui ne voudraient pour aucune considération y être vus(es)...

@ Rosie : Les murs renversés deviennent des ponts... Quelle belle image! Les préjugés, l'incompréhension, le jugement, la haine, l'intolérance, qu'ils se produisent à l'égard de personnes d'orientation, de race, de culture ou de religion différentes des nôtres, sont toujours des obstacles aux notions fondamentales d'égalité, de justice et de liberté. C'est pourquoi je considère l'homophobie au même titre que le racisme ou la xénophobie. Je suis allée voir tes deux clips. Assez percutants en effet... Je t'embrasse aussi.

@ Esperanza : J'en viens souvent aux mêmes interrogations que toi... Est-ce qu'on fait avancer ces causes? Des fois, j'ai peur qu'on ne prêche que chez les convaincus. Faire réfléchir ceux qui réfléchissaient déjà en masse? Tout à coup on ne ferait que renforcer les préjugés crasses qui subsistent encore? Que nos actions, malgré nos bonnes intentions, soient perçues comme de la provocation plutôt que de la sensibilisation? C'est comme les maudits messages publicitaires dégueulasses de la SAAQ qui m'écoeurent tant, parce que les jeunes fous qui conduisent trop vite avec les facultés affaiblies, ne les voient jamais ces pubs-là mais il y a combien de parents inquiets qui sont empêchés de dormir à chaque fois qu'on les passe et que leurs enfants ne sont pas encore rentrés de veiller??? C'est comme quand, dernièrement, un blogueur ami a écrit un billet sur Le peuple invisible (le film de Desjardins/Monderie sur les Algonquins) et que j'y ai lu avec horreur des commentaires négatifs, bourrés de préjugés et d'ignorance et tellement méprisants sur « les Indiens ». Comprends-tu que je considère l'homophobie au même titre que le racisme, ça procède de la même ignorance et ça sème la mort...

@ Bibco : Sais-tu ce qui me donne beaucoup d'espoir dans la vie, pour ce rêve utopique que je fais malgré tout? Des gens comme toi, Bibco, aident beaucoup d'enfants à grandir, quelques-uns que tu as mis au monde, et tellement d'autres que tu côtoies chaque jour, à cause de ton travail d'enseignante. Le monde de demain sera meilleur et plus juste, parce que tu es là, que tu as des convictions, que tu sèmes plein d'amour et de connaissances qui viendront, inévitablement, diluer l'ignorance et faire fleurir la paix. Ah, ma chère Harricaneuse, nous avons plus qu'une rivière en commun!

@ Tous : L'être le plus sage, le plus généreux, le plus solidaire que je connaisse, s'appelle Lylas Polson et il est Algonquin, lui-même victime de beaucoup de préjugés. Quand, parfois, j'aurais le goût de baisser les bras, il me dit avec un sourire : « Francine, never, never give up ». Tous les pas que nous faisons ne sont pas inutiles, il a raison!

Anonyme a dit…

"Comprends-tu que je considère l'homophobie au même titre que le racisme, ça procède de la même ignorance et ça sème la mort..."

Oui Zoreilles, je comprends... Je me demande juste comment... Des fois, chu découragé.

Zoreilles a dit…

@ Esperanza : Pareil pour moi, on a le droit, tu sais, mais après un moment, il faut trouver le courage (c'est parfois de l'inconscience) de se relever et agir au meilleur de notre connaissance. Comme dirait mon ami Lylas, « Esperanza, never, never give up! »

;o)

Ton petit Nathan vivra dans une société meilleure...

Soisig a dit…

Bonjour Zoreilles

Bon sang, je me suis bien reconnue dans les propos de Bilco,. Je m'étais fait les mêmes réflexions à la naissance de fiston (28 ans)... à propos de ma professions!

Mais déjà dans la famille, personne n'était ni raciste, ni homophobe ni poussé sur la religion d'ailleurs. Tout le monde avait intérêt à être soi-même et à respecter les autres! C'est une bonne école, la famille! Mais ce n'était pas le cas de la famille de mon conjoint, loin de là. Il y a eu des discussions très, très, mettons, difficiles!!! Je suis intolérante face à ... l'intolérence!

Ce que j'ai trouvé le plus difficile, c'est dans mon travail auprès des jeunes. Ça paraît tout de suite quand le milieu familial est homophobe. "A mon époque", si tu n'étais pas mariée et que tu faisais des interventions constructives, ben tu te faisais dire : "C'est parce que t'en ai une!". La bêtise humaine comme tu le dis si bien... Ce qui est dommage, c'est que le support n'est pas toujours présent dans les milieux de jeunes. Il faut avoir du "gots" et un bon équilibre (famille et amis) pour que les jeunes puissent s'en sortir grandis.

J'ai plein d'amies qui le sont, qui le vivent ouvertement et d'autres non! Et tous les amis, gars et filles, on les aime nos amies!!!

bye, Soisig

Anonyme a dit…

Chère Zoreilles,

Meci pour ce très, très touchant billet.

Tu sais, je crois que lorsqu'on est « trop » différent par rapport aux critères d'acceptation, d'inclusion convenus, le regard que l'on porte sur soi-même est déjà une immense souffrance. On est là, toujours à se demander comment entrer dans le groupe, comment se tenir, comment respirer, quoi dire ou pas, comment... comment être accepté/e, tout en se sentant très différent/e, tout en aimant plusieurs de ces différences, parce qu'elles sont... nous! Une lutte, une guerre de chaque instant. Pour survivre, si on y arrive.

Bien sûr que tout fait mal quand on est déjà jugé/e perdant/e dès le départ. Et ce réflexe d'écraser le/la plus faible pour assurer la survie du troupeau... Ce réflexe que l'on sent peser sur nous, qui nous enveloppe de peur, d'angoisse.

La violence... Qu'est-ce que la violence... Tant de mots portent de la violence, tant de silences, tant de gestes faits ou non faits, tant d'attitudes adoptées ou non adoptées, d'énergie ressenties ou non ressenties.

La violence la plus grande, pour moi, est de laisser passer celles-là. Parce qu'au lieu de soutenir les personnes jugées différentes, évaluées « trop » différentes, au lieu de les accueillir pour grandir nous-mêmes de ce qu'elles ont à nous apporter comme personnes, on leur dit que oui, elles ont bien raison de sentir que ça ne vaut pas la peine, qu'elles ne valent pas la peine. Alors qu'elles devraient valoir tant de joie.



Esperanza,

Nous reste la dignité, celle de l'effort porté par la volonté d'améliorer ce monde. Tu y travailles toi aussi, et tu as, comme tu sais tout mon estime et mon affection pour la belle personne que tu es.

Si nous n'étions lus que par des personnes déjà convaincues, les statistiques baisseraient... C'est absolument sûr. Bien des gens cheminent!

Zed

Zoreilles a dit…

@ Soisig : J'aime bien entendre ton expérience terrain, ton point de vue de femme, de Maman, d'enseignante, faisant partie d'une famille... et d'une belle-famille, d'une société, finalement.

@ Zed : Ça me fait plaisir d'avoir fait ma petite part, comme je l'écrivais dans ce billet. Je suis d'accord avec tout ce qui se trouve dans ton commentaire. Parfois, comme Esperanza, je me demande si on atteint au moins un peu les objectifs, pourtant louables, qu'on avait... Tout réside dans la manière de s'y prendre peut-être. À propos des mots (jugés méprisants = violence verbale) qu'on entend, qu'on lit, je crois comme toi qu'il faut dénoncer mais au lieu de la répression, de la fuite et du rejet, on devrait privilégier le dialogue, la conscientisation, l'éducation. Ça aussi, ça en vaut la peine.

Anonyme a dit…

Chère Zoreilles

Quand on a vérifié et que c'était bien pensé, qu'on en remet, y ajoutant du sexisme et du mépris pour les autres qui dénoncent, j'appelle ça de la violence bien songée et je ne reste pas là.

L'éducation se fait quand les oreilles sont ouvertes, le coeur et la tête disponibles.

Je vais donc faire ce que je peux autrement, ailleurs. Je n'accepte pas que l'on me manque de respect. Je ne dirai pas oui, encore s'il vous plait. Ou ça ne fait rien. Ce n'est pas de la sensibilité, c'est du respect. Et... je suis, serai, toujours, l'AUTRE. Pas celui-celle qui ne respecte pas mais celui-celle qui est différent-e et qui respecte. C'est ansi, j'aime cette partie de moi, et je n'ai aucune intention de la changer.

Bonne journée, ma belle Zoreilles.

Zed :)

Zoreilles a dit…

@ Zed : Ne change pas, surtout. Je comprends et respecte ton point de vue depuis le début. C'est une situation qui aurait été difficile à démêler même en face à face, alors, imagine dans le monde virtuel... Anecdote : Dans un cours universitaire qui s'intitulait « utilisation des ressources personnelles dans un groupe », il avait été prouvé scientifiquement (!) par mon prof et l'ensemble des étudiants/es qui constituaient le groupe laboratoire, que ton amie Zoreilles, rien ne l'arrête avec un groupe qu'elle anime mais là où elle n'a plus de ressources et qu'elle perd tous ses moyens, c'est... dans les situations de conflits!

@ Modotcom : Ton commentaire me va droit au coeur. Surtout aujourd'hui et pour mille raisons. Merci. Sincèrement.

Anonyme a dit…

On se prendra une autre tisane autour de ça.

Je suis débordée, crois-le ou non, par le 3D, vrai de vrai. Incroyable mais vrai.

Sors les tasses... On va s'en reparler très bientôt.

:) xox Zed

Anonyme a dit…

Chère Zoreilles,

la photo que tu as choisie pour illustrer ton propos, ce pont couvert qui s'ouvre sur la lumière, me fait penser aussi que tout le travail accompli dans l'ombre n'est pas en vain.

Je pense à ce texte écrit qui a été refusé, balayé d'un revers de main négligent, indifférent, et sans explication. Il y avait vraiment de quoi le prendre personnel , en effet ! Pourtant, tu continues à faire ce que tu sais être juste, en accord avec ta conscience et la personne que tu es, afin de tenter de redresser, autant que possible les injustices et les préjugés.

Pouvoir exprimer, dans ce chez-toi virtuel, ce qui te tiens à coeur, n'est pas perdu. Tu es une bâtisseuse de ponts , que ce soit dans l'ombre ou la lumière!


Bonne journée !
Lise

Zoreilles a dit…

@ Zed : D'accord. On prendra une tisane express, je suis aussi dans un tel tourbillon! J'aurais plus le goût d'écrire des billets que de travailler sur ces mandats tellement... tellement... beurk!

@ Lise : Ça m'arrive souvent ce genre de situation, tu sais. Je ne crois pas que je ferai ce métier pendant encore longtemps. Rédiger me plaît beaucoup, que ce soit un article, un communiqué de presse, un document quel qu'il soit, un scénario, n'importe quoi. C'est la recherche, la démêlouille, (je l'ai inventé ce mot-là) les approbations obligatoires par 20 personnes différentes qui maîtrisent leur domaine d'expertise mais pas le mien et tout ce qu'il y a autour de ce métier qui m'épuise. Je viens me reposer dans mon blogue, ici, on ne me vire jamais mes textes à l'envers, on ne biffe pas mes meilleures phrases, je n'ai pas à attendre des retours d'appels ou de courriels pour aller de l'avant. Ici, je n'ai rien à prouver et je me sens libre... Bonne journée à toi aussi, la mienne sera plus douce parce que t'es passée. Merci Lise.

Anonyme a dit…

Suis allergique au café, mais un express-eau?

:D Moi de même, aussi débordée qu'une rivière au printemps. Z

Rosette ou Rosie, c'est pareil a dit…

@ Zed et Zoreilles, mes douces...

Pourrions-nous alors partager une coupe de vin ?En passant, I'm joining your club : je suis également TOTALEMENT débordée ! :-(

Anonyme a dit…

Bon... Aussi débordée qu'une rivière au printemps... Il va y avoir du repassage à faire là!

Ça me "sonne" mauvais goût! Vite mes pillules...

Anonyme a dit…

C'est beau tous les commentaires que tu reçois...on dirait que tout le monde voudrait de toi comme soeur!
Ben moi c'est ça pour vrai et c'est merveilleux...na na na na hey hey goood bye
P.s. Mon oncle Gérald habitait Val-d'or comme moi..j'ai assisté au procès et j'ai aussi entendu ce qu'on disait dans la rue.
Il y a des mots que je n'ai plus jamais prononcés par la suite.....fife, pd, tapette etc.

Soisig a dit…

Moi aussi je serais partante pour un espress-eau ou une coupe de vin, hihihi!

Heureux coomme on est et heureux qui on est, ça devrait être ça pour tous... C'est ce que j'ai toujours dit à mes enfants, mais ce n'est pas ce que leur grands-parents paternels disaient chez-eux! Malheureusement la religion était là... mais j'ai toujours dit et assumé ce que j'en pensais... ;(

C'est tellement enrichissant les différences. On apprend tellement... Mais il y a des gens qui ne comprendront malheureusement jamais.

Heureusement qu'il existe des personnes comme toi, tellement rassembleuse, ma chère Zoreilles!

Soisig a dit…

Je viens de lire cette pensée : "Il est plus difficile de désagréger un préjugé qu’un atome ».
A. Einstein

Zoreilles a dit…

@ Zed : Nous mériterions toutes une petite pause mais hélas, pour le moment, ce sont nos rivières qui débordent qui mènent la course... (soupir). Ma chère Zed, mon ti-frère vient juste, en une seule phrase, d'apporter un argument incontestable à ton propos des dernières semaines.

@ Rosie : Un verre de rouge... Là, tu me prends par les sentiments! Je suis partante. J'en parle souvent avec enthousiasme mais en fait, j'en prends un verre ou deux par semaine, parfois trois, gros maximum. Chaque fois, c'est un bonheur... partagé!

@ Esperanza : Au lieu des pilules, que dirais-tu d'un bon rouge bien corsé en notre compagnie? Toi, en plus, les rivières qui débordent, tu connais, au sens propre comme au figuré! Tu « repasseras »!!!

@ Mon ti-frère : Ah, toi, je peux ben t'aimer... En plus, tu sais repérer les bonnes bouteilles, tu m'as souvent fait découvrir de bons vins! Pour mononk Gérald, il a été plus victime d'homophobie après sa mort que de son vivant. Es-tu d'accord? Tu as été témoin des abus (financiers) qu'il a subis de son amant, de son vivant, tu es le seul qui a eu le courage d'assister au procès. Je cautionne toutes les conclusions auxquelles tu en viens. Dans la famille, on n'en parle pas beaucoup, trouves-tu? Ça fait trop mal, je pense...

@ Soisig : Ça vaut vraiment la peine d'ouvrir une bouteille, nous sommes nombreux/ses à aimer un petit coup de rouge en agréable compagnie! Ça me fait réfléchir quand tu dis que c'est la religion (des grands-parents paternels de tes enfants) qui mettait un frein au fait de s'accepter, s'aimer comme on est. Aujourd'hui, la religion n'a plus l'emprise qu'elle avait (loin de là) et pourtant, il y a tellement de gens qui se pensent différents au point de se sentir exclus, ostracisés, méprisés, malheureux. L'intolérance (tacite ou exprimée) a ses fondements bien ailleurs que dans la religion, je trouve. Les esprits fermés sont légion. On pourrait s'en jaser longtemps. Belle pensée d'Einstein, un bon bonhomme, lui!

@ Tous : Savez-vous quoi? Je me sauve dans le bois en début d'après-midi, avec Crocodile Dundee! Zoreilles, la délinquante, abandonne ses contrats en cours, pour trois jours, pas question d'apporter du travail en forêt, ça pourrait la salir... Dans mon petit baluchon, j'amène mon appareil photo et une bouteille de rouge, je penserai à vous quand j'y goûterai. Aussi 2 bouquins : le dernier de mon amie, Louise Desjardins, « Le fils du Che », et celui d'une autre amie, que je relis de temps en temps, « Mon coeur, jamais », de Margot Lemire. Il fait soleil, il y a des diamants sur mon lac, il y en aura aussi sur ma rivière Outaouais et sur la Darlens. Les perdrix sont dans la saison des amours, mon mâle tétras va m'en faire, des méchants sparages! Oui, je me sauve... pour revenir dimanche, à la fête des Mères.

Anonyme a dit…

Zoreilles,

C'est justement ce que je venais souligner et saluer : la pertinence et la sensibilité du commentaire du petit frère.

Salut, petit frère!

Zed :)

Anonyme a dit…

Chère Zoreilles,

oui ton petit frère a bien raison. Tout le monde voudrait avoir une soeur qui te ressemble, et il est bien conscient de sa chance. À lire tes réponses, il est évident que l'amour frère-soeur est réciproque.

Et il y a des non-dit, des retraits justement parce que les choses font trop mal, parce qu'il est impossible d'en parler, pour ne pas être blessé davantage face à l'incompréhension. Tellement de choses, de situations invraisemblables sont le lot quotidien de bien des gens.

Alors mieux vaut se taire pour éviter le jugement des autres, qui viendra tôt ou tard de toute manière.

J'espère que vous aurez eu une belle fin de semaine d'évasion. Se sauver ( au propre et au figuré ) est parfois essentiel !

Soisig a dit…

Fillette m'a appelée hier soir (elle était déjà le dimanche en Nouvelle-Zélande) pour me souhaiter une belle fête des mères!

J'ai bien aimé quand elle m'a dit qu'à son travail (elle en a un!) de femme de ménage dans un grand hôtel, elle était... minorité visible! La ptite blonde aux yeux bleus détonne!

Elle m'a surtout raconté combien elle était heureuse d'être en la compagnie de tout ce beau monde (maoris en majorité), qu'elle avait beaucoup de plaisir à discuter... en anglais, que tous l'avaient super bien accueillie...hihihi!

Si c'était aussi facile aussi pour tous ceux qui ont choisi de vivre dans un nouveau pays, ce serait formidable, non?

Mais je crains que l'ignorance n'aie toujours prédominance face à "la différence" (couleur, sexualité, religion, statut social...) pour certains! Pour ma part, je ne baisse pas les bras et je suis contente de voir mes enfants apprécier "la différence"!

menfin a dit…

quel plaisir de voir ici que des humains gardent l'espoir d'un monde meilleur

Zoreilles a dit…

@ Zed : Il est super, mon p'tit frère, je le partage avec toi... ;o)

@ Lise : Avec toi aussi, je le partage. Les p'tits frères, c'est comme le gâteau au chocolat, « c'est bien meilleur quand on partage ».

@ Soisig : Nos filles ont bien de quoi en commun! Isa m'appelait ce matin, 5 heures, pour me dire quelque chose de fabuleux en cette fête des Mères. Pour elle, à Taragona, Espagne, il était midi. Elle parle espagnol ces temps-ci, découvre chaque jour des réalités fascinantes. La différence, elle sait l'apprécier, elle la cherche même. On a bien de la chance d'avoir nos filles qui nous font voyager dans les univers qu'elles découvrent.

@ menfin : Bonjour et bienvenue ici. Votre commentaire fait aussi naître une étincelle d'espoir, c'est comme ça que je le perçois...